Page:Fiel - La fille du mineur, 1947.djvu/30

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 28 —

sa conscience : l’année précédente elle était allée chez les Terla pour leur souhaiter bonnes Pâques, mais cette année, elle n’en avait pas eu le temps. Quand on a un fiancé, il faut lui montrer quelque attention et s’occuper de lui. Puis, elle pensait aussi que ce serait peu délicat d’étaler sa joie aux yeux de Louis. Malgré soi, son rêve réalisé se serait trahi sur son visage, et elle ne voulait pas provoquer de peine inutile.

Un beau dimanche ; un beau lundi où l’allégresse fut presque partout, et la routine reprit.

Les mineurs redescendirent dans la mine, les corons se vidèrent de leurs visiteurs et les femmes retournèrent au lavoir et à leurs besognes quotidiennes.

Léone rencontra Louis Terla. Elle fut frappée par son visage douloureux et obéissant à un réflexe qu’elle ne put retenir, elle s’écria :

— Tu n’es pas malade ?

— Non, mais tu sais pourquoi je souffre.

— Mon pauvre Louis, reprends-toi ! Le rêve de ma vie passe à ma portée, et je ne veux pas le laisser échapper.

— Tu aimes ce Marius ?

Léone rougit et murmura :

— Il me plaît parce qu’il est bon garçon, mais tu peux penser qu’il est encore un inconnu pour moi. Je ne peux pas prétendre éprouver un profond amour pour lui, parce que nous manquons de souvenirs. Nous apprendrons à nous connaître et cela a son charme aussi.

Louis se déroba afin que Léone ne vît pas deux larmes qui coulaient de ses yeux.

Si elle ne les aperçut pas, elle les devina et son cœur se serra. Elle eut un geste d’impuissance. La destinée était là qui détruisait parfois le rêve ébauché,

Marius Jolly devait repartir après la Quasimodo. Bien qu’attristé de quitter Léone pour quelque temps, il ne perdait pas son exubérance. Il s’habituait même à la grisaille du Nord, et il se surprit à vanter la paix qu’on goûtait dans ce pays noir. Léone n’en marqua pas sa surprise tout haut, mais elle s’avoua que son fiancé savait trouver de la poésie en tout. Et elle se découvrit un certain regret de quitter sa ville natale.

Vers le milieu de la semaine, un bruit terrible courut soudain vers la fin de la matinée.

« Le grisou ! le grisou ! il y a eu une explosion ! »