Page:Fiel - Le Sacrifice et l'Amour, paru dans l'Écho de Paris du 3 février au 7 mars 1934.djvu/224

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— Le monde prétend que rien n’est juste… Tout le devient quand on réfléchit et qu’on sait attendre, en désirant la joie des autres… Votre dévouement me paraissait presque urne dérision, lorsque vous me l’avez avoué.

— Je ne l’aurais pas dû, murmura Christiane, je vous ai peinée inutilement.

— Non, pas « inutilement »… Je m’étais attiré ce châtiment parce que mon triomphe de mère éclatait trop orgueilleusement, répliqua la veuve humblement. Vous avez bien fait de parler. Je reconnais que votre dévouement a été une habileté, non consciente, il est vrai, qui accumulait vos chances de récompense. Par chances, j’entends titres au bonheur. Le monde traduira chances. Pour moi, c’est un mot qu’on applique au hasard. La chance existe peu, ce sont les actes qui la créent. Ce sont de petites forces qui se nouent et rendent le destin inéluctable.

Les yeux de Christiane se remplissaient de larmes en entendant ces paroles. Elle pensait à Bertranne et se remémorait ses boutades.

Sûrement, elle lui aurait dit, si la majesté de la mort ne l’eût retenue :

— Il y a le double de femmes à marier que d’hommes actuellement. Il faut bien que quelques-unes cèdent la place !