Page:Fiel - Le fils du banquier, 1931.djvu/35

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Une voix cria :

— Entrez…

Il ouvrit et se trouva dans un petit vestibule sur lequel une porte était ouverte.

Il s’avança. Près d’une fenêtre, un malade était étendu sur une chaise longue.

— Mon père !

— Gérard !

Le fils, en deux enjambées, fut près de son père qu’il enlaça de ses bras.

— Papa ! papa !… quel retour !…

Sans fausse honte, Gérard pleurait.

Quel retour, en effet, et combien différent de celui qu’il imaginait !

Il devait rentrer marié, dans un hôtel qu’il rêvait de rendre plus élégant encore, et il savourait d’avance tout le plaisir de gâter sa jeune femme en l’entourant de luxe.

Aujourd’hui, il échouait dans un logement misérable, en face d’un père malade…

Il suffoquait d’émotion, ne sachant plus que dire.

— Mon fils, mon cher fils ! répétait le malade.

Gérard avait craint que l’état de son père ne fût pire. Quand il avait entendu parler d’éblouissement, il avait eu très peur de quelque congestion qui eût atteint pour de longues semaines ce cerveau si solide.

Mais l’esprit était lucide et les yeux pétillaient d’intelligence. La voix sonnait peut-être un peu voilée, mais le revoir émouvant pouvait en être cause.

— Mon cher fils ! quel effondrement ! Combien je suis peiné pour toi !… Combien j’aurais voulu te laisser tout ignorer !… Quel sort je te fais, mais ce n’est pas de ma faute !

Cri sublime d’un père qui s’excuse de donner un tel destin à son enfant.

— Mon cher papa, ne t’alarme pas pour moi… J’ai compris que j’avais vécu comme un inutile en ne faisant pas mon devoir d’homme. C’est à mon tour de travailler.

— Mon pauvre enfant !… Tu devais revenir heureux, et te voici seul, ayant sans doute causé de la douleur… et j’en suis responsable !…

— Ne parlons pas de cela. Tu n’es pour rien dans cette catastrophe… Le typhon est une force brutale que rien ne pouvait faire prévoir…

— Peut-être n’ai-je pas assez vérifié les moyens de protection de cette mine… On est toujours responsable jusqu’à un certain point, mais on s’en aperçoit toujours trop tard… Changeons de sujet. Ta fiancée ne t’en veut pas trop ?