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Page:Fiel - Mon erreur, paru dans La Croix du 22 mai au 14 juillet 1949.djvu/180

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encore, tu te serais montrée exubérante, mais en ce moment tout paraît l’excéder. Il faut te dominer, ma petite fille.

Juste ciel ! que pouvais-je entendre ! Moi qui devenais folle de concentration, moi qui bandais mes nerfs à les faire craquer, je me voyais reprocher mon manque de maîtrise ! Il est vrai que je provoquais cette incompréhension et que je n’avais guère le droit d’accuser.

Cette soirée se termina enfin, et je fus de nouveau à l’abri dans ma chambre. La fenêtre était ouverte et la lune brillait, métallique. Des bruits assourdis me parvenaient, mais tout se préparait au repos.

Pour moi, le repos n’existait pas.

Ce serait demain que je livrerais la bataille, et un frisson me parcourait J’appréhendais de me glisser dans mon lit, sachant que le sommeil me fuirait. Combien de fois me suis-je retournais durant cette nuit horrible ? Un statisticien prétend que lorsqu’on dort normalement, sans soucis, on change de position quarante fois en dix heures. Quel était mon record ? Je me suis éveillée plus de cent fois, le front inondé de moiteur. Et chaque fois j’agitais le problème de rejeter Jean Gouve ou de l’accepter.

Le matin me trouva plus résolue. Je me levai sans surexcitation excessive. J’étais décidée.

Tout le monde était réuni dans la salle à manger pour le petit déjeuner, et je ne voulus pas attendre. Après avoir embrassé mes parents, je dis :