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prudence rocaleux

mait, mais elle se retint, sachant que sa domestique employait le langage fruste.

Prudence reprit :

— Et pis, Madame… Voyez cette curiosité et cette malice… Elles m’ont choisie pour amie, parce que je sers chez un juge… Elles pensaient se renseigner sur les affaires de la justice et savoir si elle cherchait toujours l’assassin… Puis, qui aurait soupçonné l’amie de la cuisinière d’un magistrat ? J’étais comme un parapluie, elles s’y mettaient à l’abri…

Mme Dilaret ne put s’empêcher de sourire de cette image, bien qu’elle la trouvât judicieuse. Elle voyait dans le récit de Prudence la culpabilité certaine de ces femmes, et elle fit part à son mari de ce qu’elle avait entendu.

Il ne douta pas.

La fortune soudaine de ces jumelles, la ténacité avec laquelle leur but avait été pour suivi, la parfaite connaissance des lieux et l’occasion qu’elles avaient saisie, au moment de l’absence des domestiques, de celle du fils, la circonstance des 40 000 francs dans la table de chevet, circonstance qui ne pouvait être connue que par une personne au courant des habitudes, devenaient des preuves nettement accusatrices.

L’affaire ne traîna pas.

Leurs aveux furent arrachés mot par mot d’abord et souvent par surprise, puis franchement formulés par Julie, plus faible que sa sœur.

Justine avait tué… Julie, elle, s’était montrée partout pour créer son alibi, comme l’avait déduit Prudence, très justement. Leur ressemblance leur fournissait le don inattendu d’ubiquité.

Prudence obtint ses 100 000 francs, et ce fut un beau jour pour elle.