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prudence rocaleux

Ça c’est une menterie, vous le comprenez, Madame ! Quand on n’a que ça à faire, on peut en lire dans une journée ! Mais monsieur fait semblant d’être fatigué, et savez-vous pourquoi ?

— Je ne vois pas bien quelle est son intention.

— Eh ben ! c’est pour se payer une secrétaire à domicile.

— Chacun a le droit d’avoir une secrétaire.

— Que Madame est simple ! Cette secrétaire-là veut dire que ce monsieur a une mauvaise conduite et qu’il a l’aplomb d’inviter cette petite à venir chez lui, soi-disant pour l’aider à lire son courrier !

— Oh ! Prudence, auriez-vous une langue venimeuse ?

— Je sais que j’ai une langue qui parle juste, mais je ne sais ce que Madame entend par venimeuse.

— Ce mot-là signifie langue de vipère, langue qui empoisonne, et je serais navrée d’avoir une semblable personne dans ma maison.

— Oh ! là, là ! qu’elle soit coupée, ma langue, si je mens ! Cette secrétaire, je l’ai vue ! Donc, c’est pas un fantôme, ni un racontar. Elle est entrée avec son air joyeux en criant : « Bonjour, Marcel ! » C’en était une honte dans la maison d’un homme assassiné. Et ça vous faisait des mines et des contre-mines ! Quand elle m’a vue, ah ! ma mère ! elle est devenue toute rouge et elle a reculé, embarrassée. Dame, elle a compris qu’elle s’était trahie… Je suis une personne digne et ça gêne toujours de me voir quand on a la conscience chargée.

Mme Dilaret ne savait plus que penser. Le ton de Prudence était si convaincu que l’on pouvait croire à sa sincérité ! D’après ce com-