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trop belle

— Ce n’est plus un but pour moi… les temps modernes sont à l’action…

Elle eut des larmes dans les yeux, et Madame Bullot aussi émue qu’elle, murmura :

— Vous êtes une malheureuse enfant… mais ne vous pressez pas… attendez encore un peu pour prendre une décision… une année de plus ou de moins n’est rien… Vous me paraissez si jeune… à moi qui ai soixante-dix ans !… Non… je ne veux pas de vous comme secrétaire… ce serait gênant pour moi… je n’oserais pas vous commander… Puis… je voudrais une personne ayant habité l’Angleterre… parce que j’ai la fantaisie de travailler un livre pour agrémenter mes loisirs…

— Ah ! fit Sylviane étonnée.

— Vous seriez trop prise avec moi… puis… il faut que j’aille à Vichy… faire une petite cure…

— Nous aussi… c’est l’année où mon père s’y rend…

— Ah ! tant mieux… nous nous y verrons…

— Vous emmènerez votre secrétaire ?…

— Je le pense…

Sylviane s’en retourna.

Elle n’avait pas osé questionner Madame Bullot sur son neveu, l’ayant vue plus préoccupée de soi que de ce revenant.

Après son départ, Madame Bullot se frotta les mains. Il semblait que ses doigts eussent repris une certaine élasticité, mais ce n’était qu’une illusion sans doute, car à l’instant où la femme de chambre entra, il ne restait rien de ces gestes agiles.

Malgré cette atteinte à sa santé, la sérénité de la vieille dame paraissait redoublée. Ses yeux reflétaient de la malice et son sourire se moquait des choses visibles pour elle seule.

Sylviane ne lui avait pas promis de visite proche, mais deux jours après, elle reçut un mot par lequel sa vieille amie la priait de passer chez elle, pour l’aider à introduire un peu d’ordre dans quelques papiers avant l’arrivée du secrétaire.

Heureuse de se rendre utile, la jeune fille se hâta d’acquiescer à cette requête.