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Une fois que des pensées nouvelles pour Jones se furent emparées de son esprit, elles lui causèrent une agitation qui, dans l’état de foiblesse où il étoit encore, auroit pu avoir des suites graves, sans la bonté de sa constitution. Il sentoit le mérite de Sophie, il admiroit ses attraits, ses talents, il adoroit ses vertus. Comme il n’avoit jamais conçu l’idée de la posséder, ni cherché à nourrir une douce et vaine illusion, sa passion pour elle étoit beaucoup plus forte qu’il ne le croyoit. Frappé d’une lumière subite, il découvrit en même temps qu’il aimoit, et qu’il étoit aimé.


CHAPITRE III.



BEAUCOUP DE MOTS ET PEU DE CHOSE, POUR CEUX À QUI LA NATURE A REFUSÉ UN CŒUR.

On se figure peut-être que les émotions qui remplissoient le cœur de Jones avoient tant de charmes, qu’elles devoient, au lieu d’un pernicieux désordre, y exciter une ivresse délicieuse ; mais on se trompe. Quelque ravissantes que soient de