son enjouement. Dévoré d’une sombre mélancolie lorsqu’il étoit seul, dans le monde il avoit l’air distrait, abattu. Si pour complaire à M. Western, il essayoit de sourire, sa contrainte décéloit d’une manière sensible le chagrin qu’il s’efforçoit en vain de dissimuler.
Il seroit difficile de dire ce qui le trahissoit le plus, de l’art ingénieux à cacher sa passion, ou de la nature toujours prête à en révéler le secret. Tandis que l’un lui imposoit devant Sophie une sévère réserve, le condamnoit au silence, le forçoit même d’éviter ses regards, l’autre sembloit se faire un jeu de détruire en un instant l’effet de toutes ses précautions. À l’approche de sa jeune maîtresse, il pâlissoit ; il tressailloit, s’il la voyoit paroître inopinément. Quand par hasard, ses yeux rencontroient les siens, le sang refluoit avec violence vers ses joues, et son visage devenoit brûlant. Si la politesse l’obligeoit de lui parler, de porter à table sa santé, il ne faisoit que balbutier ; s’il la touchoit, sa main, tout son corps frémissoit. Au moindre mot qui avoit trait à l’amour, il soupiroit involontairement ; et il ne se passoit pas un jour, qu’il ne fût exposé à quelque épreuve de ce genre.
Tous ces symptômes échappoient à l’attention de l’écuyer, mais non à celle de sa fille. Elle remarqua bientôt l’agitation qui régnoit dans le