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difficulté qu’il avoit eue avec le lieutenant chargé de la caisse, avoit confié à Northerton une somme de cinquante livres sterling, appartenant à la compagnie : celui-ci la déposa entre les mains de l’hôtesse, apparemment comme un gage de son exactitude à se représenter plus tard, pour répondre à ses juges. De quelque nature qu’aient été leurs conditions, il est certain que l’une eut l’argent, et l’autre, sa liberté.

D’après le naturel compatissant de l’hôtesse, on auroit lieu de croire, qu’en voyant le pauvre factionnaire emprisonné pour une faute dont elle le savoit parfaitement innocent, elle s’empressa de demander grace pour lui. Mais, soit que sa pitié fût épuisée par l’effort précédent, soit que la figure du soldat, quoique assez semblable à celle de l’enseigne, n’eût pas également la vertu de l’émouvoir, loin de prendre la défense du nouveau prisonnier, elle se plut à exagérer ses torts auprès de son chef, et jura, les yeux et les mains levés vers le ciel, qu’elle ne voudroit pas pour tout l’or du monde, avoir contribué à l’évasion d’un meurtrier.

La tranquillité étant une seconde fois rétablie dans l’auberge, la plupart des voyageurs retournèrent se coucher. L’hôtesse, que son humeur active et ses craintes pour sa vaisselle empêchoient de dormir, engagea les officiers, qui ne devoient