mirent fin à ses confidences : de sorte que Blifil ignoroit son refroidissement pour Molly.
Il se berçoit donc des plus riantes espérances, et, convaincu que Sophie s’étoit comportée avec lui, suivant les règles que l’usage prescrit aux jeunes filles, en pareille occasion, il tiroit de cette première entrevue un favorable augure.
M. Western épioit l’instant de sa sortie. À son air passionné, radieux, triomphant, l’écuyer ne se sentit pas d’aise ; il se mit à danser, à cabrioler, et à exprimer de cent manières grotesques l’excès de sa joie. Le vieux gentilhomme ne savoit se modérer en rien. Dès qu’une passion s’emparoit de lui, elle le jetoit dans une espèce de délire.
Il ne laissa partir Blifil, qu’après l’avoir embrassé vingt fois. Il courut ensuite chez sa fille, où ses transports recommencèrent de plus belle.
« Demande-moi, lui dit-il, tous les habits, tous les bijoux que tu peux souhaiter. Je ne veux user de ma fortune, que pour te rendre heureuse. » Il la prit entre ses bras, lui prodigua les caresses les plus affectueuses, l’appela des plus doux noms, et jura qu’elle faisoit son unique joie sur la terre.
L’écuyer étoit assez sujet à ces sortes d’accès, mais il en avoit rarement d’aussi vifs. Sophie, sans trop deviner le motif de celui-ci, crut devoir en profiter pour découvrir ses sentiments à