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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 1.djvu/162

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La chaîne deviendra la tangente de cette roue ; elle y sera fixée par une de ses extrémités. Après lui avoir fait faire autour une ou plusieurs révolutions, elle ne pourra s’élever perpendiculairement sans faire tourner la roue, et, par conséquent, l’arbre et les rames d’une manière propre à faire avancer le vaisseau. Lorsque le balancier cessera de faire monter la chaîne, un poids suspendu à une corde mise autour de la roue la fera mouvoir en sens contraire, et la remettra dans son premier état à mesure que descendra la chaîne du balancier.

« La machine à feu donnant 15 impulsions dans une minute et le jeu du piston dans le cylindre étant de 6 pieds, on voit qu’une puissance motrice de près de 11 000 livres fera avancer le vaisseau avec une vitesse considérable, et qui deviendra d’autant plus grande que la roue à cliquets sera d’un plus petit diamètre, qu’on doit pourtant proportionner à la force de la machine… »

Rien n’est oublié dans cet intéressant écrit, de ce qui pouvait assurer la réussite de ce projet, et confirmer les promesses d’une théorie séduisante. Malheureusement, répétons-le, la machine de Newcomen ne pouvait en aucune manière, se prêter à l’application que l’auteur avait en vue. Excellentes en principe, ses vues ne pouvaient donc, à cette époque, trouver leur réalisation.

Ce sont des idées à peu près semblables que mit en avant un ecclésiastique du canton de Berne, nommé Genevois, dans une brochure qui parut à Londres, en 1760, et qui avait pour titre : Quelques découvertes pour l’amélioration de la navigation. Cet opuscule est consacré à développer les applications de ce que l’auteur appelle « le grand principe ». Ce grand principe se réduisait à l’invention des rames articulées ou palmées, système moteur qui a reçu le nom de palmipède.

Cet appareil de navigation consiste en une sorte de palme qui s’ouvre, en s’appuyant sur l’eau, comme le pied des oiseaux aquatiques, pour imprimer un mouvement de progression en avant, et se referme quand cet effet a été produit. Des ressorts poussaient ces sortes de rames, en se détendant par leur élasticité.

Genevois, qui était surtout un homme à projets, proposait toutes sortes d’applications de ce mécanisme. Il voulait construire des chariots munis de voiles et marchant par l’impulsion de ces ressorts palmés, quand le vent viendrait à manquer. Pour appliquer le même système à la navigation, il proposait de produire, au moyen de la machine à vapeur de Newcomen, la tension des ressorts qui, en se débandant, devaient faire marcher les roues du navire.

Mais son projet favori était de mettre ces ressorts en action par la force expansive de la poudre à canon.

La poudre à canon était alors fort à la mode, comme puissance motrice. Nous avons vu Papin, Huygens et l’abbé de Hautefeuille, étudier cette force motrice avec une constante ardeur. Pendant le siècle suivant on s’en préoccupait beaucoup encore. Genevois nous dit, dans sa brochure, qu’il a grandement perfectionné l’usage de la poudre à canon comme force motrice. Il rappelle, pour faire juger des progrès qu’il a apportés à l’emploi de ce moyen, qu’avant lui on tirait un bien faible parti de la force de la poudre à canon, puisque, trente ans auparavant, un expérimentateur écossais, dont il cite le nom, avait été obligé de faire détoner trente barils de poudre, pour faire avancer un vaisseau de trois lieues.

Voilà, certes, un agent mécanique qui avait besoin d’être perfectionné !

Ce qu’il y avait de sérieux dans tout cela, c’était d’appliquer la machine à vapeur de Newcomen à la propulsion des navires, au moyen d’un mécanisme nouveau. Mais la machine de Newcomen, par ses imperfections, était hors d’état de rendre le moindre service comme agent de propulsion nautique économique et régulier.

Cependant, les défauts de la machine de Newcomen, qui avaient jusque-là rendu impossible son emploi à bord des navires, étaient destinés à être bientôt corrigés, et grâce aux changements qu’allait subir, par le progrès de la science, cette forme primitive de la