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l’électricité résineuse et l’électricité vitrée ; ou, si l’on veut, positive et négative.

« Le hasard, continue Dufay, m’a présenté un autre principe plus universel et plus remarquable que le précédent, et qui jette un nouveau jour sur la matière de l’électricité.

« Ce principe est qu’il y a deux sortes d’électricités fort différentes l’une de l’autre : l’une que j’appelle électricité vitrée, et l’autre électricité résineuse. La première est celle du verre, du cristal de roche, des pierres précieuses, du poli des animaux, de la laine et de beaucoup d’autres corps. La seconde est celle de l’ambre, de la gomme copale, de la gomme laque, de la soie, du fil, du papier et d’un grand nombre d’autres substances.

« Le caractère de ces deux électricités est de se repousser elles-mêmes et de s’attirer l’une l’autre. Ainsi, un corps de l’électricité vitrée repousse tous les autres corps qui possèdent l’électricité vitrée, et au contraire il attire tous ceux de l’électricité résineuse. Les résineux pareillement repoussent les résineux et attirent les vitrés. On peut aisément déduire de ce principe l’explication d’un grand nombre d’autres phénomènes, et il est probable que cette vérité nous conduira à la découverte de beaucoup d’autres choses. »

Dans le passage que nous venons de citer, Dufay établit avec une grande lucidité, l’existence de deux espèces d’électricités : l’une, qu’il appelle électricité vitrée, appartient au verre, au cristal de roche, aux pierres précieuses, à la laine, aux poils des animaux, etc. ; l’autre, qu’il nomme électricité résineuse, est celle de l’ambre, de la soie, du fil, du papier, etc. Le caractère distinctif de ces deux électricités, c’est de se repousser elles-mêmes et de s’attirer l’une l’autre. Un corps qu’anime l’électricité vitrée, repousse tous les corps qui jouissent de la même électricité ; il attire, au contraire, ceux qui possèdent l’électricité résineuse.

Le principe posé par Dufay était d’un ordre tout à fait supérieur ; il ouvrait un champ immense aux progrès de la science électrique. À l’époque où il fut, pour la première fois, formulé par son auteur, il rendit un service inestimable en répandant la clarté sur le plus grand nombre des phénomènes observés jusque-là, et permettant de les grouper d’une manière systématique. C’est grâce à ce principe et aux lois de l’attraction électrique, découvertes plus tard par Coulomb, que l’on a pu concevoir une idée rigoureuse des phénomènes si complexes de l’électricité, et les soumettre au calcul. Enfin, la théorie de Dufay a permis, jusqu’à notre époque, d’expliquer commodément et avec simplicité tous les phénomènes électriques. La découverte du physicien français se recommande donc sous bien des aspects, à la reconnaissance des savants.

Fig. 228. — Dufay.

Le principe établi par Dufay n’eut pas seulement une importance théorique, il eut encore son utilité pratique : il donna le moyen de reconnaître facilement, par expérience, à laquelle des deux électricités appartient un corps quelconque, animé d’un état électrique inconnu. Il suffit, pour s’assurer immédiatement de l’espèce d’électricité que renferme ce corps, d’en approcher un fil de soie électrisé résineusement. Si le fil est repoussé, le corps et le fil ont la même électricité, c’est-à-dire la résineuse. Si le fil est attiré par le corps, celui-