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de ce point, une barre de fer, de la même dimension que pour un seul paratonnerre, servira de conducteur aux deux (fig. 293 et 305).

Lorsqu’on aura trois paratonnerres sur un édifice, il sera prudent de leur donner deux conducteurs (fig. 306). En général, chaque paire de paratonnerres exige un conducteur particulier.

Quel que soit le nombre des paratonnerres placés sur un édifice, on les rendra tous solidaires, en établissant une communication intime entre les pieds de toutes leurs tiges, au moyen de barres de fer de mêmes dimensions que celles des conducteurs (fig. 306, 307, 308).

Fig. 308.

Lorsque les localités le permettront, on placera les conducteurs sur les murs des bâtiments qui font face au côté d’où viennent le plus fréquemment les orages dans chaque lieu. En effet, ces murs étant exposés à être mouillés par la pluie, deviennent des conducteurs, quoique imparfaits, en raison de la mince nappe d’eau qui les couvre ; et si le conducteur du paratonnerre n’était pas en communication intime avec le sol, il serait possible que la foudre l’abandonnât pour se précipiter sur la face mouillée. Un autre motif encore, c’est que la direction de la foudre peut être déterminée par celle de la pluie, et qu’en outre la face mouillée peut, comme conducteur, appeler la foudre de préférence au paratonnerre. C’est surtout pour les clochers que cette observation est importante, et qu’il est nécessaire d’y avoir égard.


Observations sur l’efficacité des paratonnerres.

Une expérience de cinquante années sur l’efficacité des paratonnerres démontre que, lorsqu’ils ont été construits avec les soins convenables, ils garantissent de la foudre les édifices sur lesquels ils sont placés. Dans les États-Unis d’Amérique, où les orages sont beaucoup plus fréquents et plus redoutables qu’en Europe, leur usage est devenu populaire ; un très-grand nombre de bâtiments ont été foudroyés, et l’on en cite à peine deux qu’ils n’aient pas mis entièrement à l’abri des atteintes de la foudre. Tout le monde sait que les parties métalliques, sur un édifice, sont frappées de préférence par la foudre, et ce fait seul démontre l’efficacité des paratonnerres, qui ne sont que des barres métalliques disposées de la manière la plus avantageuse, d’après les connaissances acquises sur la matière électrique par la théorie et l’expérience. La crainte d’une chute plus fréquente de la foudre sur les édifices armés de paratonnerres n’est pas fondée, car leur influence s’étend à une trop petite distance pour qu’on puisse croire qu’ils déterminent la foudre d’un nuage à se précipiter dans le lieu où ils sont établis. Il paraît au contraire certain, d’après l’observation, que les édifices armés de paratonnerres ne sont pas foudroyés plus fréquemment qu’avant qu’ils le fussent. D’ailleurs la propriété d’un paratonnerre d’attirer plus fréquemment la foudre supposerait aussi celle de la transmettre librement dans le sol, et dès lors il ne pourrait en résulter aucun inconvénient pour la sûreté des édifices.

Nous avons recommandé l’usage des pointes aiguës pour les paratonnerres, parce qu’elles ont l’avantage, sur les barres arrondies à leur extrémité, de verser continuellement dans l’air, sous l’influence du nuage orageux, un torrent de matière électrique de nature contraire à la sienne, qui doit très-probablement se diriger vers celle du nuage, et en partie la neutraliser. Cet avantage n’est point du tout à négliger ; car il suffit de connaître le pouvoir des pointes, et les expériences de Charles et de Romas avec un cerf-volant sous un nuage orageux, pour rester convaincu que les paratonnerres en pointe, s’ils étaient plus multipliés et placés sur des lieux élevés, diminueraient réellement la matière électrique des nuages et la fréquence de la chute de la foudre sur la surface de la terre.

Cependant, lorsque la pointe d’un paratonnerre aura été émoussée par la foudre ou par une cause quelconque, il ne faudra pas croire, parce qu’elle aura perdu l’avantage dont on vient de parler, qu’elle ait aussi perdu son efficacité pour protéger le bâtiment qu’elle est destinée à défendre. Le docteur Ritenhouse rapporte qu’ayant souvent examiné et passé en revue, avec un excellent télescope de réflexion, les pointes des paratonnerres de Philadelphie, où ils sont en grand nombre, il en a vu beaucoup dont les pointes étaient fondues ; mais qu’il n’a jamais appris que les maisons où ces paratonnerres étaient établis eussent été frappées de la foudre depuis la fusion de leurs pointes. Or cela n’aurait pas manqué d’arriver à quelques-unes, au moins au bout d’un certain temps, si leurs paratonnerres n’avaient pas continué de bien faire leurs fonctions ; car on sait, par nombre d’observations, que, lorsque le tonnerre est tombé en quelque endroit, il n’est pas rare de l’y voir retomber encore.

Pour que le fruit que l’on doit retirer de l’établissement des paratonnerres soit aussi grand que possible, et que l’on puisse profiter de l’expérience acquise sur une localité, pour la faire tourner à l’avantage