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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 1.djvu/612

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anatomiste, était peu au fait de l’électricité. Les mouvements musculaires qu’il avait observés lui paraissant inexplicables, il se crut transporté dans un nouveau monde[1]. »

Nous invoquerons à l’encontre de cette dernière assertion, le témoignage du savant physicien italien, M. Matteucci, si compétent en un tel sujet[2]. M. Matteucci dit, à propos des connaissances de Galvani dans l’électricité :

« Du reste, dans un mémoire latin qui est très-peu répandu, et dans lequel il s’occupe de la lumière électrique dans l’air plus ou moins raréfié, on peut voir que Galvani était bien au courant de toutes les découvertes et de toutes les théories de l’électricité. Dans son mémoire sur l’usage et l’activité de l’arc conducteur, Galvani dit que la contraction de la grenouille peut très-bien s’expliquer, dans le cas dont nous avons parlé, par le coup de retour. On voit bien qu’il expliquait le phénomène comme nous le faisons encore. »

Ainsi Galvani songea à expliquer par le phénomène du choc en retour, le mouvement convulsif de la grenouille, mais il ne crut pas devoir s’arrêter à cette explication. Préoccupé depuis longtemps, de la pensée que le fluide nerveux n’est autre chose que l’électricité libre circulant dans l’économie animale, il se refusa à admettre que le phénomène qu’il venait d’observer, fût le résultat d’un simple choc en retour. Il considéra ces contractions musculaires comme le premier anneau d’une chaîne de découvertes qui devaient le conduire à la vérification expérimentale d’une théorie séduisante. Il espéra arriver à déterminer les lois et la nature de cet influx nerveux qu’il avait tant étudié.

L’événement prouva d’ailleurs que dans cette circonstance, l’anatomiste eut raison de ne pas s’en tenir exclusivement aux préoccupations du physicien.

Quoi qu’il en soit, Galvani, justement frappé de l’importance du fait nouveau qui venait de se révéler entre ses mains, résolut d’en poursuivre l’étude d’une manière approfondie. Il entreprit une longue série de recherches, avec toutes sortes d’animaux, sur la manière dont la décharge de la machine électrique provoque les contractions musculaires. Cette catégorie d’expériences ne dura pas moins de six années.

Dans ces longues recherches, Galvani étudia avec le plus grand soin l’influence qu’exerce l’électricité des machines pour provoquer à distance les contractions musculaires des animaux à sang froid et à sang chaud, soit peu d’instants après leur mort, soit pendant la vie. Il procéda à cette étude avec une méthode, une sagacité, une rectitude de jugement qui peuvent être citées comme un exemple à suivre dans l’observation d’un phénomène obscur par son côté physique, et compliqué par l’élément, si épineux, de l’intervention de la vie.

Dans le problème offert à sa curiosité philosophique, il y avait trois termes principaux, dont il fallait déterminer les conditions et l’influence : l’électricité comme agent du phénomène ; — les nerfs qui produisaient, par leur intermédiaire, le mouvement contractile observé ; — le corps étranger, qui, mis en contact avec les nerfs, provoquait les contractions.

Les premières expériences de Galvani portèrent sur ce corps étranger qui, par son contact avec les nerfs, excitait les mouvements de la grenouille. Dans l’expérience telle qu’elle avait été faite pour la première fois, on s’était servi d’un scalpel à manche métallique, c’est-à-dire d’un corps très-bon conducteur de l’électricité. Galvani répéta l’expérience avec tous les corps bons, médiocres, ou mauvais conducteurs du fluide électrique, et il reconnut que les substances conductrices avaient seules la propriété de provoquer les convulsions musculaires. Il étudia aussi

  1. Éloge historique de Volta. — Œuvres de François Arago : Notices biographiques, t. I, p. 212.
  2. Traité des phénomènes électro-physiologiques des animaux, 1re partie, p. 7.