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que l’on voit se manifester l’attraction magnétique ; dès que la communication est suspendue, le fer revient à son premier état : de telle sorte que, dans une seconde par exemple, on peut produire plusieurs fois, dans le fer, ces alternatives d’aimantation et d’état naturel.

Le lecteur va comprendre comment on peut se servir du phénomène de l’aimantation temporaire du fer, pour produire, à travers toutes les distances, un effet mécanique, et résoudre ainsi le problème général de la télégraphie électrique.

Supposons qu’il s’agisse d’établir une communication électrique entre Paris et Rouen. Plaçons à Paris, une pile voltaïque en activité, étendons jusqu’à Rouen le fil conducteur de la pile ; enroulons, à Rouen, l’extrémité de ce fil conducteur autour d’une lame de fer doux (fer très-pur), et ramenons le conducteur à la pile voltaïque située à Paris. Le fluide électrique, circulant autour de la lame de fer, l’aimantera, et si l’on place au-devant de cette lame, ainsi artificiellement aimantée, un disque de fer mobile, aussitôt ce disque sera attiré et viendra s’appliquer contre l’aimant. Maintenant, que l’on interrompe le courant électrique, en supprimant la communication du fil conducteur avec la pile, aussitôt la lame de fer doux revient à son état habituel, elle cesse d’être aimantée, elle n’attire plus le disque de fer.

Fig. 40. — Électro-aimant avec son armature attachée à un ressort à boudin.


Or, si, pour se porter vers l’aimant, la pièce de fer a eu à vaincre la résistance d’un petit ressort, comme on le voit dans la figure 40 ; dès que le courant sera interrompu, le ressort R ramènera la pièce de fer mobile F à sa position primitive, car la puissance de l’électro-aimant A ne contre-balancera plus la tension du ressort. Ainsi, chaque fois que l’on établira et que l’on interrompra le courant, la pièce de fer sera portée en avant, puis repoussée en arrière ; par la seule action de la pile, on pourra exercer de Paris à Rouen une action mécanique qui donnera naissance à un mouvement de va-et-vient.

L’aimantation temporaire du fer par un courant électrique donne donc le moyen d’exercer, à travers l’espace, un mouvement d’attraction et de répulsion ; la pile de Volta permet, à toute distance, de mettre un levier en mouvement. Tel est le principe fondamental de la plupart des appareils actuels de la télégraphie électrique. En effet, ce mouvement de va-et-vient une fois produit, la mécanique fournit un grand nombre de moyens différents d’en tirer parti pour l’appliquer au jeu des télégraphes.

Rien de plus varié que les procédés que l’on a mis en œuvre pour utiliser cette action mécanique ; les nombreuses combinaisons imaginées pour l’application de l’électricité à l’art des signaux, ont donné naissance à autant de télégraphes particuliers qui, bien qu’identiques dans leur principe, diffèrent cependant beaucoup entre eux par les détails de leur mécanisme. Mais le système mécanique qui fut adopté dès l’origine par Samuel Morse, a été conservé jusqu’à notre époque, parce qu’il répond parfaitement à tous les besoins.

Samuel Morse est le créateur de l’appareil magnéto-électrique, et c’est à lui qu’appartient l’honneur d’avoir établi la première ligne de télégraphe électrique qui ait fonctionné dans le Nouveau-Monde. À ce titre nous devons à nos lecteurs quelques détails sur la personne de ce héros pacifique de l’humanité et du progrès, et sur les circonstances qui l’ont amené à faire sa belle découverte.

Comme beaucoup d’autres grands inventeurs, Samuel Morse n’était ni physicien, ni mécanicien ; il était peintre, et c’est par hasard, pour ainsi dire, qu’il fut amené à s’oc-