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mand gut, qui signifie bon)[1]. Ces plaques reconnues bonnes furent naturellement les seules employées à la confection des diaphragmes de la pile. Or, lorsqu’après ses expériences terminées, M. Jacobi démonta la pile, il fut surpris de trouver tous les g qui avaient servi à marquer les bonnes plaques poreuses, reproduits en cuivre, c’est-à-dire recouverts d’un dépôt de cuivre qui provenait de la dissolution du sulfate de cuivre de la pile. La plombagine du crayon qui avait servi à faire ces marques, avait rendu, en ces points, la terre poreuse conductrice de l’électricité, et avait permis ce dépôt.

Cette nouvelle découverte, faite en 1839, par M. Jacobi, permit à ce physicien d’employer, comme moule galvanoplastique, une substance quelconque non conductrice, comme le plâtre, la cire à cacheter, etc., en ayant la précaution de rendre l’intérieur de ce moule, conducteur de l’électricité, par une couche de plombagine en poudre.

M. Bocquillon fit, dit-on, à la même époque, la même découverte, en France, c’est-à-dire employa la plombagine en poudre pour rendre conducteurs des moules de plâtre ou de cire à cacheter.

On put, dès ce moment, au lieu d’opérer uniquement sur un moule métallique, se procurer des empreintes de plâtre des objets à reproduire, et effectuer le dépôt sur ces moules rendus conducteurs par la plombagine.

Ce dernier résultat une fois obtenu, la galvanoplastie put recevoir des applications variées et étendues.

Le plâtre et la cire à cacheter sont les seules substances qui aient d’abord servi à la confection des moules galvanoplastiques. On a découvert ensuite dans la gélatine, coulée à chaud et retirée du moule après le refroidissement, une matière plastique se prêtant très-heureusement à cet objet, par la fidélité avec laquelle elle conserve l’empreinte des objets à reproduire, et par son élasticité, qui permet de retirer le moule sans la déchirer. Enfin une dernière substance, bien supérieure aux précédentes, la gutta-percha, a été appliquée à la confection des moules galvanoplastiques. Cette matière, qui se ramollit par la chaleur, est appliquée à chaud sur l’objet, dont elle reproduit tous les détails avec une fidélité étonnante. Après le refroidissement, on détache sans difficulté le moulage de l’original.

La gutta-percha est à peu près la seule matière plastique employée aujourd’hui pour la confection des moules dans la galvanoplastie ; c’est de la découverte de l’emploi de cette substance que date l’essor immense qu’a pris la galvanoplastie industrielle.

Nous ajouterons, pour terminer cette histoire de l’invention de la galvanoplastie, que cet art qui a rendu à l’industrie des services si étendus, qui a contribué, de nos jours, à donner une si vive impulsion à la sculpture, à la gravure et à la typographie, a reçu tout à la fois en Russie sa naissance, ses perfectionnements et ses premières applications. L’empereur Nicolas comprit très-vite l’importance de cette invention. Il acheta pour la somme de 25 000 roubles (101 250 francs) le brevet d’invention qu’avait pris en Russie M. Jacobi. Le gendre de l’empereur Nicolas, le duc de Leuchtemberg, cher à la France, comme petit-fils de l’impératrice Joséphine, fit établir en Russie une usine de galvanoplastie, où les procédés de M. Jacobi furent appliqués sur une échelle considérable. L’Institut galvanoplastique du duc de Leuchtemberg était une manufacture qui occupait jusqu’à 2 500 ouvriers, et que le gouvernement russe entretenait à peu près comme le fait le gouvernement français pour la manufacture de porcelaines de Sèvres. Plusieurs églises russes sont remplies de statues en cuivre et de grandes pièces de fonte et de fer, telles que colonnes, tabernacles, toitures, etc., dorées par la pile, et qui provenaient de l’Institut galvanoplastique du duc de Leuchtemberg. La coupole intérieure

  1. M. Jacobi est né en Prusse, mais il est naturalisé russe.