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furent traitées inutilement par M. Oudry, pendant plus de huit mois. Chaque fois que ces chaudières passaient du premier bain au second, pour y recevoir une nouvelle couche de cuivre de plusieurs millimètres d’épaisseur, la fonte, insuffisamment préservée par la pellicule de cuivre du premier bain, était toujours attaquée çà et là. Et comme il suffit de quelques points attaqués pour rendre une opération mauvaise, il fallait sans cesse retirer ces pièces des bains, et recommencer toutes les opérations, sans parvenir au but proposé. M. Oudry se vit donc forcé de rendre ces chaudières non cuivrées, et, en revanche, mises dans le plus triste état.

Il en fut malheureusement de même, pendant longtemps encore, pour des statues, des vases, des balcons, d’autres grandes chaudières de fonte et quantité d’autres pièces de fonte ou de fer, qui lui étaient envoyées pour être soumises au cuivrage à forte épaisseur.

M. Oudry comprit à la fin qu’il faisait fausse route. Renonçant donc à cuivrer les fontes par le décapage et les bains voltaïques, il se mit à chercher un autre moyen d’obtenir, d’une manière industrielle et pratique, des dépôts de cuivre à grande épaisseur sur le fer et la fonte.

L’idée lui vint alors d’un système de cuivrage tout différent. La principale cause de son insuccès, sur la fonte surtout, provenait du décapage, qu’on ne peut opérer que par l’emploi des acides. Il fallait donc couper le mal à sa racine, en évitant le décapage ; puis, faire en sorte de trouver une économie assez sensible, par la suppression du premier bain voltaïque, et arriver enfin à des opérations sûres, pratiques et industrielles.

Comment obtenir ces résultats ? En recouvrant la fonte et le fer (préalablement nettoyés par la voie sèche, c’est-à-dire sans acide) d’une ou de plusieurs couches d’un enduit, lequel devait tout à la fois préserver le métal, et, étant rendu conducteur de l’électricité au moyen de la plombagine, permettre de cuivrer, sans danger, le fer, dans un bain saturé de sulfate de cuivre, et par conséquent, acide.

L’idée théorique était trouvée ; mais il restait à créer le moyen pratique, c’est-à-dire la composition d’un enduit qui fût tout à la fois adhérent à la fonte, et adhérent aussi au cuivre dont on le couvrait dans le bain voltaïque.

M. Oudry employa deux ans à chercher ce bienheureux enduit. Il finit par composer, au moyen de la benzine, une sorte de vernis ayant toutes les qualités requises, c’est-à-dire assez fluide pour s’appliquer facilement et sécher promptement, capable, en outre, de retenir le cuivre déposé à sa surface et de faire corps avec lui.

L’invention de M. Oudry, tout excellente qu’elle fût, aurait mis un temps considérable à faire son chemin dans le monde, si cet insaisissable concours de circonstances que nous appelons le bonheur, et qui préside aux destinées des inventions comme à celles des hommes, n’était venu un jour le favoriser d’un sourire.

Dans cette rénovation magique à laquelle la ville de Paris était alors soumise, on avait décidé d’orner les places publiques et les promenades, de diverses pièces monumentales de fonte, telles que fontaines, candélabres à gaz, poteaux indicateurs des routes, etc. Mais il fallait préserver de toute altération ces pièces métalliques, exposées nécessairement aux influences atmosphériques, tout en leur donnant cette couleur de bronze consacrée par le goût et par l’usage. Un ingénieur de la ville, M. Darcel, était au courant des nouveaux procédés de cuivrage industriel par la pile, que venait d’imaginer M. Oudry. Il les communiqua à M. Alphand.

M. Alphand n’est pas seulement ingénieur en chef des ponts-et-chaussées de la ville de Paris, directeur de la voie publique et des promenades ; il est encore un artiste plein d’imagination et de goût, comme l’ont prouvé suffisamment la transformation du bois de Boulogne, les paysages des Buttes-