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Ce bain (fig. 235, page 381), placé dans une cuve de bois reposant sur le sol, est un véritable appareil simple, en tout semblable à celui que nous avons décrit pour les opérations de la galvanoplastie ; ce qui veut dire que la pile voltaïque est placée dans le bain même. Les godets de porcelaine dégourdie, ou diaphragmes poreux, contenant l’acide sulfurique et le zinc, sont placés dans la dissolution même du sulfate de cuivre, de sorte que ce système, ainsi que l’appareil simple de la galvanoplastie, peut être considéré comme une pile de Daniell, dans laquelle l’auget contenant la dissolution de sulfate de cuivre, serait considérablement agrandi.

Dans de petites boîtes de bois, dont toutes les parties sont à claire-voie, et que l’on dispose au-dessus du liquide, dans lequel ils trempent en partie, sont des cristaux de sulfate de cuivre : ces cristaux se dissolvant dans l’eau du bain, le maintiennent à l’état de saturation, au fur et à mesure que la liqueur s’appauvrit en cuivre, par le dépôt voltaïque.

Un nombre convenable de vases poreux ou diaphragmes de porcelaine contenant l’acide sulfurique et le zinc, sont rangés tout le long et à peu de distance de la pièce à cuivrer.

Les godets poreux de porcelaine ainsi placés en ligne, agissent parfaitement sur les parties droites du candélabre. Mais la gorge de la colonne et du piédestal, sont des parties courbes, qui se couvriraient inégalement, si l’on se servait de godets ordinaires. Pour cuivrer ces parties saillantes, M. Oudry remplace les godets de porcelaine par des vessies de bœuf, ou de porc, contenant de l’acide sulfurique étendu et un morceau de zinc. Ces vessies se moulent facilement, à peu de distance des parties concaves ou convexes de la pièce, et elles jouissent, aussi bien que les godets de porcelaine, de la propriété d’endosmose, c’est-à-dire de la perméabilité au gaz hydrogène, nécessaire au jeu de l’appareil. M. Oudry usa 140 000 de ces vessies, quand il eut à cuivrer les fontaines, les candélabres et les colonnes rostrales de la place de la Concorde.

Pour que le dépôt de cuivre soit égal sur toutes les parties, il faut tourner, de temps en temps, chaque pièce, de manière à lui faire exécuter un quart de révolution.

En quatre jours en été et en six jours en hiver, le dépôt de cuivre a acquis l’épaisseur de 1 millimètre, qui est jugée nécessaire. On retire alors les pièces du bain. Elles présentent, en ce moment, le magnifique ton rose de cuivre pur qui est d’un effet si agréable à l’œil, mais qui est, malheureusement, si éphémère.

Tout serait terminé, si le cuivre pouvait conserver à l’air ce joli ton rose ; malheureusement il n’en est pas ainsi, et l’oxydation ne tarde pas à brunir, à noircir cette vive couleur. Il faut donc donner au cuivre précipité la coloration du bronze.

Pour cela, après avoir décapé les pièces avec une eau faiblement acidulée par l’acide azotique, et les avoir frottées avec du papier de verre, pour enlever au cuivre son apparence mate et terne, on passe sur le métal, au moyen d’une brosse, une liqueur, composée d’ammoniaque et d’acétate de cuivre, qui attaque légèrement le métal, le verdit partiellement, et lui donne les jeux de couleur du bronze florentin.

Les pièces sont alors terminées[1]. Il ne reste plus qu’à rapprocher les deux parties,

  1. M. Oudry bronze également le fer et la fonte par un procédé de métallisation tout superficiel, qui n’a rien d’électrochimique, mais qui est trop intéressant pour ne pas être signalé ici en quelques mots. Il prépare une poudre de cuivre très-divisé, en recueillant les fragments de cuivre qui proviennent de différentes opérations ; et il les triture au moyen de pilons mus par la vapeur. Il mélange cette poudre de cuivre avec l’enduit qui lui sert d’agent intermédiaire pour le cuivrage voltaïque, et il obtient ainsi une peinture d’un beau ton de cuivre, que l’on bronze ensuite avec de la liqueur ammoniacale, dont il a été question plus haut, comme s’il avait affaire au cuivre même. Les pièces de fonte recouvertes de cette peinture métallique, ont tout à fait l’aspect de pièces cuivrées et bronzées par la pile.

    Cette peinture est extrêmement adhérente ; mais elle n’est, bien entendu, qu’une simple peinture, qui ne peut avoir la durée d’un dépôt électro-chimique. Son avantage réside dans l’économie de son application. On peut voir un échantillon de cette peinture au cuivre pulvérisé sur le nouveau balcon du Théâtre-Français.