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canique. Cependant, comme il n’existe guère aujourd’hui d’autre récompense, d’autre satisfaction pour les savants, que de voir leurs travaux signalés à l’attention et à la reconnaissance du public, nous dirons, pour rapporter à leur véritable auteur le mérite des premiers essais dans l’ordre de recherches qui nous occupe, que la plus ancienne tentative pour appliquer à un travail utile l’action des aimants artificiels, appartient à l’abbé Salvator dal Negro, savant ecclésiastique de Padoue, qui se consacrait avec succès à l’étude des phénomènes électriques. En 1831, l’abbé dal Negro essaya de tirer un parti mécanique de l’électro-magnétisme, à l’aide d’un instrument que l’on trouve décrit dans la quatrième partie d’un mémoire de ce savant sur le magnétisme temporaire imprimé dans le tome IV des Actes de l’Académie des sciences, lettres et arts, de Padoue[1].

Ce n’est pourtant que quelques années après, que la science s’est enrichie des notions rigoureuses concernant l’emploi mécanique de l’électricité. En 1834, M. Jacobi, qui devait s’illustrer bientôt, par la découverte de la galvanoplastie, présenta à l’Académie des sciences de Saint-Pétersbourg un mémoire sur l’application de l’électro-magnétisme au mouvement des machines, où cette question se trouvait étudiée d’une manière approfondie. Dans ce travail, qui fut également communiqué à l’Académie des sciences de Paris (le 1er décembre 1834), l’auteur soumettait à un calcul attentif tous les éléments à considérer pour l’application pratique de la force électro-motrice[2].

L’appareil proposé par M. Jacobi, pour appliquer l’électricité au mouvement des machines, se composait de deux disques métalliques placés verticalement l’un au-dessus de l’autre, portés sur un axe commun, et munis tous les deux, de barreaux de fer doux disposés sur leur pourtour. Ces barreaux de fer, placés en regard et presque en contact l’un avec l’autre, par leur extrémité libre, étaient disposés de telle sorte que les extrémités libres des barreaux d’un même disque, constituaient alternativement des pôles magnétiques de nom contraire. L’un de ces disques était fixe, et l’autre mobile autour de l’axe. Il résultait de cette disposition que, par suite de l’attraction électro-magnétique qui s’exerçait entre les pôles opposés des électro-aimants (le pôle nord et le pôle sud), lorsque les barreaux de fer du disque mobile occupaient le milieu des intervalles qui séparaient les barreaux de fer du disque fixe, les attractions et les répulsions mutuelles qui s’établissaient entre les pôles opposés de tous ces aimants faisaient tourner le disque mobile. L’axe du disque ainsi mis en mouvement pouvait donc servir à mettre en action un arbre moteur.

L’empereur Nicolas attachait beaucoup d’importance aux travaux de M. Jacobi. Une somme de 60 000 francs fut accordée à ce physicien, sur la cassette impériale, pour continuer ses recherches, exécuter en grand son appareil et l’appliquer, dans une expérience décisive, à un travail mécanique.

Pendant l’année 1839, l’appareil que nous venons de décrire fut, en effet, installé sur une chaloupe, et l’on en fit l’essai sur la Newa. Mais cette expérience ne donna que des résultats défavorables, qui déterminèrent l’abandon des recherches entreprises par le professeur de Dorpat.

M. Jacobi n’a pas même publié dans le

  1. L’appareil électro-magnétique de l’abbé dal Negro se trouve aussi mentionné dans le Polygraphe de Vérone, avril 1832, et dans le Journal des beaux-arts et de technologie de Venise, pour 1833, p. 67, sous ce titre : Nuova machina elettro-magnetica immaginata dall’abbate Salvatore dal Negro. La description complète du même appareil a été donnée dans le second cahier (mars et avril 1834) des Annales du royaume lombardo-vénitien. On fait connaître, dans ce mémoire, divers moyens de profiter de l’électro-magnétisme pour mettre en mouvement une machine propre à soulever un poids. Disons, enfin, que le même travail fut présenté le 10 mars 1834 à l’Académie des sciences de Paris.
  2. Ce mémoire de M. Jacobi a été reproduit dans les Archives de l’électricité de M. de La Rive, année 1843, p. 233.