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décrire les principaux appareils qui servent à produire la vision stéréoscopique.

Les objets extérieurs produisent au fond de notre œil, une image semblable à celle qui se forme dans la chambre obscure des physiciens. Mais nos deux yeux, en raison de leur écartement, ne sont pas placés exactement de la même manière par rapport à l’objet que nous considérons. Aussi les images produites à l’intérieur de chacun de nos yeux, ne sont-elles pas exactement pareilles : l’une est plus étendue que l’autre ; l’une est plus éclairée ou plus colorée que l’autre, etc. Nous recevons donc deux impressions distinctes, deux images différentes d’un même objet. Cependant tout le monde sait bien que ces deux perceptions se fondent, s’allient en un jugement simple, c’est-à-dire que nous n’apercevons qu’un objet unique. C’est là un phénomène bien curieux. Il tient à diverses causes : à l’éducation des yeux, à une habitude prise dès l’enfance, à un effort, sans doute réel, mais dont nous n’avons pas conscience, et qui, combinant entre elles les deux images dissemblables perçues par chacun de nos deux yeux, les complète l’une par l’autre, et en compose une seule, conforme à l’objet considéré, c’est-à-dire présentant le relief qui existe dans la nature.

C’est donc un effort de notre intelligence, sourd en quelque sorte, qui nous donne le sentiment du relief.

Ce sentiment du relief s’efface quand on regarde avec les deux yeux, des objets très-éloignés. Notre jugement devient alors incertain, et même trompeur. Pourquoi ? Parce que l’intervalle qui sépare nos yeux est, relativement, si petit, que les deux images de l’objet situé à une grande distance, ne présentent plus de différence entre elles, s’accordent sans effort sur nos deux rétines, et ne produisent plus dès lors la sensation du relief.

Ainsi la sensation du relief est due à ce que deux images différentes d’un même objet, viennent se peindre sur la rétine de chacun de nos yeux, et que ces deux images, se combinant, produisent le sentiment du relief. Nous nous contentons de poser, au début, ce principe, dont nous donnerons tout à l’heure la démonstration.

Il sera nécessaire, avant d’aller plus loin, de dire quelques mots des travaux et des observations qui ont amené la découverte du stéréoscope.

La première idée de la vision stéréoscopique, ou binoculaire, est fort ancienne. Elle se trouve dans les ouvrages du savant géomètre grec, Euclide, contemporain d’Archimède, qui professait les mathématiques à l’école d’Alexandrie, en Égypte, vers l’an 280 avant Jésus-Christ.

Euclide dit, en effet, que si nous croyons voir avec nos deux yeux un objet unique, cela tient à la rapidité extrême avec laquelle nos deux yeux en parcourent toutes les parties, et à la simultanéité d’impression faite ainsi dans nos deux yeux, par ces deux images, pourtant distinctes.

Le célèbre médecin grec Galien, qui vécut à Rome, sous l’empereur Marc-Aurèle, c’est-à-dire vers l’an 170 après Jésus-Christ, rapporte la même hypothèse. Nous disons hypothèse, car, à cette époque, cette théorie, n’ayant pas été démontrée expérimentalement, ne pouvait être qu’une conjecture.

Jusqu’au seizième siècle, aucun écrit ne rappelle la connaissance de ce principe. Il faut arriver jusqu’en 1584, pour trouver quelque renseignement à ce sujet.

C’est dans un manuscrit écrit à Milan, que le grand peintre florentin, Léonard de Vinci, consigna la différence qui existe entre les images d’un même objet, vu simultanément par les deux yeux. Un pas de plus, et la découverte du stéréoscope était faite par Léonard de Vinci. Mais l’étude des sciences n’occupa qu’accidentellement l’esprit de ce grand homme.

Neuf années plus tard, le physicien italien