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centaine de tours avec leur vitesse habituelle, triturant les briques et les graviers avec la poudre : il n’en résulta pourtant aucun accident.

Les explosions, selon Vergnaud, ne se produisent guère que les jours où le vent souffle du nord-nord-est, lorsque le temps est à l’orage. Quand il y a beaucoup d’électricité dans l’air et qu’on regarde fonctionner les meules, des lueurs apparaissent parmi la poudre qui se broie. Parfois même les étincelles surgissent avec la brillante lueur de celles qui proviennent des machines électriques. Quand ce phénomène se produisait, Vergnaud se hâtait de faire augmenter l’arrosage du mélange.

Nous dirons pourtant que la cause d’explosion la plus fréquente dans les moulins à poudre provient de ce que les meules, dont le poids est quelquefois de plus de 5 000 kilogrammes, rencontrent des portions de galette volumineuses et dures. Lorsque ces fragments ne sont pas écrasés, ils forment un obstacle, le long duquel la meule s’élève, pour retomber bientôt sur le reste de la poudre. Cette chute d’une hauteur d’un ou deux centimètres seulement, mais d’une masse d’un poids énorme, suffit pour provoquer un dégagement de chaleur capable d’enflammer la poudre. Là est le véritable danger des meules, et la cause la plus fréquente de l’explosion des ateliers.

Les auteurs de la brochure allemande que nous avons citée plus haut, ont rassemblé les faits relatifs à l’explosion des magasins à poudre. Voici les principaux.

1535. Devant Marseille, la poudre d’une batterie, déposée dans des barils, s’enflamme par la seule détonation des canons.

1540. Devant Bude, la poudrière d’une batterie fait explosion par suite du tir de cette dernière.

1703. À Huy, on roule contre l’ennemi, qui montait à l’assaut, un baril de poudre, muni d’une mèche enflammée. Chemin faisant, le baril se défonce, s’enflamme et communique, au moyen de la traînée de poudre, le feu au magasin d’où on l’avait tiré ; ce dépôt saute en l’air.

1744. Les Prussiens en quittant Prague veulent jeter dans un puits, 3 000 quintaux de poudre, pour qu’on ne puisse pas s’en servir. En la versant dans l’eau, la poudre s’enflamme par le frottement, et il en résulte une explosion formidable[1].

Voici deux exemples des accidents qui arrivent pendant la préparation des munitions de guerre.

En 1677, pendant qu’on déchargeait une grenade, d’après la méthode de Forster, cette grenade s’enflamma. Le feu se communiqua à 11 grenades chargées, qui tuèrent Forster lui-même et 16 hommes.

En 1862, le laboratoire de chimie qui dirigeait, pendant la campagne, la fabrication des poudres pour les troupes de l’Union américaine Nord, sauta, ce qui coûta la vie à plusieurs centaines de personnes, etc.[2].

Les coups de tonnerre frappant des magasins de poudre ou des manufactures de munitions de guerre, peuvent occasionner l’inflammation de toutes ces matières, et renverser les édifices. C’est là chose bien connue. Nous rappellerons pourtant les principaux faits de ce genre qui ont été enregistrés, en ayant recours, pour cette énumération, au travail des deux ingénieurs allemands que nous avons déjà cité.

En 1521, la foudre frappa et fît sauter la poudrière de Milan, qui contenait 250 000 livres de poudre.

En 1648, la poudrière de Savone sauta, frappée d’un coup de foudre ; 200 maisons furent détruites.

En 1749, le feu du ciel détruisit la poudrière de Breslau, où travaillaient 65 hom-

  1. La poudre à tirer et ses défauts, page 46.
  2. Ibidem, page 50.