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le développement, peu après remballage, d’une légère odeur, et la propriété qu’il acquiert de rougir légèrement du papier de tournesol avec lequel on l’a emballé.

6o La décomposition du coton-poudre de qualité supérieure, tel qu’on l’obtient en suivant exactement le mode de fabrication indiqué par Lenk, lorsqu’on l’expose pendant un temps assez long à une température fort supérieure à celle des tropiques, a été trouvé très-insignifiante en comparaison des résultats publiés récemment par des chimistes du continent. L’altération légère qu’il pourrait éprouver peut d’ailleurs être combattue avec succès par des moyens très-simples, et qui, sans modifier en quoi que ce soit les propriétés de la substance, rendent l’emmagasinage et le transport du coton-poudre aussi peu dangereux, et, dans certaines circonstances, moins dangereux encore, que lorsqu’il s’agit d’emmagasiner et de transporter la poudre ordinaire.

7o Du coton-poudre, à l’état de parfaite pureté, résiste d’une manière remarquable aux effets destructeurs d’une température voisine de 100 degrés, et les produits nitreux inférieurs de la cellulose (coton-poudre soluble) ne sont certainement pas plus sujets à la décomposition lorsqu’ils sont à l’état de pureté.

8o Mais les produits ordinaires de la fabrication du coton-poudre contiennent toujours de faibles proportions d’impuretés organiques azotées, douées de propriétés instables, et qui ont été formées par l’action de l’acide nitrique sur des matières étrangères retenues par la fibre du coton, matières qui n’ont pu être complétement séparées par les procédés employés dans la purification de la substance. C’est la présence de ces impuretés dans le coton-poudre qui donne d’abord lieu au développement d’un acide libre lorsqu’on expose cette substance aux effets de la chaleur. C’est ensuite à l’action de cet acide qu’est dû l’effet destructeur qui a lieu sur les produits de la cellulose, et qui est suivi d’une décomposition que la chaleur accélère notablement. Il suffit de neutraliser la petite quantité d’acide libre, à mesure qu’il se développe, pour éloigner toute action de décomposition sur le coton-poudre. On y parvient facilement en répartissant d’une manière uniforme dans la masse d’une solution de coton-poudre, une faible quantité de carbonate de soude.

9o L’introduction dans le coton-poudre de 1 pour 100 de carbonate de soude suffit pour que cette substance n’éprouve aucune altération importante, lors même qu’elle se trouverait exposée à une température assez élevée pour produire un commencement de décomposition dans les produits parfaitement purs de la cellulose. À plus forte raison n’en éprouverait-elle aucune par suite des chaleurs les plus intenses que l’on rencontre dans les régions tropicales. Le seul effet que l’addition de cette petite quantité de carbonate de soude pourrait produire sur les propriétés explosives du coton-poudre, serait d’augmenter quelque peu la petite quantité de fumée qui accompagne sa combustion, et peut-être aussi d’en retarder légèrement l’explosion : résultats qui ne sont pas de nature à rien enlever à la valeur de cette substance.

10o L’eau est un excellent préservatif du coton-poudre, même lorsque cette substance devrait être soumise à une température très-élevée, pourvu qu’elle ne soit pas exposée à la lumière du soleil pendant un temps très-long. Il n’est pas nécessaire de plonger le coton-poudre dans l’eau. Un séjour dans de l’air saturé de vapeur aqueuse suffit pour le mettre à l’abri de toute décomposition, lors même qu’il se trouverait emballé en grande quantité en paquets serrés. L’eau enlève aussi aux impuretés organiques, qui se trouvent habituellement dans le coton-poudre, la faculté de développer un acide lorsque cette substance se trouve fortement serrée par un emballage à l’état sec. Du coton-poudre légèrement humecté a pu être conservé pendant trois ans sans développer la plus petite trace d’acidité. Au bout de ce temps, si l’on expulse du coton-poudre saturé d’eau tout le liquide dont on peut se débarrasser, au moyen de l’extracteur centrifuge, on obtient une substance qui, quoique légèrement humide au toucher, n’est plus du tout explosive, et, partant, ne présente plus aucune chance d’accident. C’est donc dans cet état qu’il convient d’emballer le coton-poudre pour le transporter dans des pays éloignés. En ajoutent à l’eau, dont on commence par le saturer, une très-petite quantité de carbonate de soude, le coton-poudre, lorsqu’on voudra le sécher pour en faire des cartouches, ou l’employer à tout autre usage, se trouvera renfermer la matière alcaline requise pour son emmagasinage à l’état sec dans toute espèce de climat. »

Tels sont les résultats de plusieurs années d’expériences attentives poursuivies à l’arsenal de Woolwich. Ils tendent à prouver que les cas si nombreux d’altération et de décomposition spontanée constatés en France, peuvent être attribués à une mauvaise préparation du fulmi-coton, et que l’addition d’un centième de carbonate de soude au produit préparé par la méthode de Lenk, suffit pour garantir sa stabilité. Ces résultats apportent un correctif, utile à enregistrer, à l’impression défavorable qui doit résulter des observations que nous avons fait connaître.

En regard des inconvénients ou des dan-