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Dans beaucoup de cas, il pourrait suffire pour décider l’action. On sait, en effet, que des troupes novices sont souvent déjà ébranlées et mises en déroute, lorsqu’un homme sur dix tombe dans les premiers rangs. Pour qu’une colonne résiste encore après avoir perdu un homme sur trois ou sur quatre, il faut qu’elle soit déjà bien aguerrie, et que la perte se distribue sur un espace de temps assez considérable. Quand un tiers des soldats est mis hors de combat dans l’espace de quelques minutes, il est rare que la panique ne s’empare point des survivants, à moins que ce ne soient des hommes parfaitement éprouvés. En outre, un feu rapide et efficace présente l’avantage de réduire considérablement le nombre des adversaires dès le début de l’action.

Sous ce rapport, la supériorité d’un tir rapide est donc manifeste, et le chargement par la culasse, qui a permis de tripler la vitesse du tir, doit être considéré comme un immense progrès dans l’armement des troupes.

Quant aux inconvénients de ce mode de chargement, ils consistent dans la difficulté d’obtenir un mécanisme solide et durable, ainsi que l’obturation complète du tonnerre, obturation sans laquelle on ne peut éviter les crachements. Constatons néanmoins qu’on est parvenu aujourd’hui à y remédier d’une manière satisfaisante, si bien qu’aucune objection sérieuse ne peut plus être opposée à l’admission des armes se chargeant par la culasse dans la pratique de la guerre.

La science n’a pas dit, sans doute, son dernier mot sur cette question, mais elle ne réalisera de nouveaux progrès qu’à la condition de se renfermer dans le programme suivant, auquel devra satisfaire, pour être reconnue excellente, toute arme se chargeant par la culasse :

1o Il faut que le mécanisme chargé d’ouvrir et de fermer le tonnerre, se manœuvre avec facilité et promptitude, et qu’il soit en même temps simple et solide.

2o L’obturation de l’arme doit être parfaite, pour empêcher toute fuite de gaz.

3o L’encrassement doit être assez lent pour ne pas devenir un obstacle au chargement de l’arme, au bout d’un temps qui n’excède pas la durée d’une campagne ordinaire.

4o L’arme doit être exempte de dangers pour le tireur ; elle doit être agencée de telle façon que le coup ne puisse pas partir avant la fermeture complète du tonnerre, et que le système obturateur soit fixé assez solidement, pour n’être pas chassé par la force de l’explosion.

5o Enfin, la cartouche doit être d’une fabrication facile et d’un prix modéré.

Le fusil Chassepot réalise la plupart de ces conditions. Les quelques inconvénients pratiques qu’il peut présenter encore, sont parfaitement rachetés par les avantages extraordinaires qui lui sont propres, et que nous avons énumérés.


CHAPITRE VI

fusils à répétition. — systèmes spencer et winchester. — révolvers. — systèmes colt, adams-deane, mangeot-comblain, loron, le mat et lefaucheux. — la carabine jarre. — les mitrailleuses. — la mitrailleuse belge et la mitrailleuse américaine. — conclusion.

On nomme fusils à répétition des armes dans lesquelles sont emmagasinées à la fois plusieurs charges, qu’on introduit successivement dans le canon, à l’aide d’un mécanisme simple et rapide. Sous le rapport de la vitesse du tir, les fusils de ce genre sont bien supérieurs aux meilleures armes se chargeant par la culasse ; et on le conçoit facilement, puisqu’ils permettent de tirer plusieurs coups sans exécuter, après chaque coup, cette série de mouvements, qui constituent la charge ordinaire, et entraînent une perte de temps plus ou moins grande, suivant les systèmes.

On peut, toutefois, se demander s’il y a utilité réelle à dépasser certaines limites dans