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Bry-sur-Marne. Une grille en fer entoure un socle de granit, servant de piédestal à un pilastre tumulaire, à la partie inférieure duquel se voit un médaillon reproduisant les traits de l’artiste. Sur l’une des faces du piédestal, on lit :

À DAGUERRE
la société libre des beaux-arts
m dccc lii

La cérémonie de l’inauguration de ce monument se fit en présence de toute la population de la commune, et sous les auspices d’une commission de la Société des beaux-arts. On se rendit à l’église, où fut célébré un requiem en l’honneur de l’illustre défunt. Ensuite, on se rendit processionnellement au cimetière, escorté de quelques congrégations religieuses du voisinage, et du clergé paroissial, en habits sacerdotaux. Quand le cortège fut arrivé dans le cimetière du village, et après la cérémonie religieuse, le secrétaire de la Société des beaux-arts lut un Éloge de Daguerre.

Voilà le seul hommage public qui ait été accordé à l’inventeur de la photographie.

Un témoignage touchant lui a été rendu en Amérique. À New-York, les photographes, sur l’annonce de la mort de Daguerre, portèrent pendant quinze jours, un crêpe au bras, en signe de deuil ; et ils réunirent, par souscription, une somme de 50 000 francs, pour élever un monument à sa gloire. Cette noble initiative contraste avec notre indifférence. L’Amérique s’est montrée reconnaissante envers notre compatriote, alors que la France demeurait oublieuse envers lui. Puisque tant de nos illustrations nationales ont aujourd’hui leur statue, serait-ce trop demander que d’exprimer le vœu que le même hommage soit rendu un jour, à l’inventeur de la photographie, dans cette ville de Paris aux portes de laquelle il a vu le jour ?


CHAPITRE VI

photographie sur papier. — m. talbot. — m. bayard. — sir john herschell. — procédés généraux de la photographie sur papier.

Lorsqu’un amateur de Lille, M. Blanquart-Évrard, publia, au commencement de l’année 1847, la description d’un excellent procédé pratique pour la photographie sur papier, cette communication fut accueillie par les amateurs et les artistes avec un véritable enthousiasme, car elle répondait à un vœu qui avait été formé depuis longtemps et qui était resté jusque-là stérile.

On comprend sans peine les nombreux avantages que présentent les épreuves photographiques obtenues sur papier, et leur supériorité sur les produits de la plaque. Elles n’ont rien de ce miroitage désagréable qu’il est impossible de bannir complètement dans les épreuves sur métal, et qui a l’inconvénient de rompre toutes les habitudes artistiques ; elles présentent l’apparence ordinaire d’un dessin : une bonne épreuve sur papier ressemble à une sépia faite par un habile artiste. L’image n’est pas simplement déposée à la surface, comme dans les épreuves sur argent, elle fait corps jusqu’à une certaine profondeur avec la substance du papier, ce qui lui assure une durée indéfinie et une résistance complète au frottement. Grâce à l’épreuve positive succédant à l’épreuve négative, le trait n’est point renversé, comme dans les dessins du daguerréotype ; il est au contraire parfaitement correct pour la ligne, c’est-à-dire que l’objet est reproduit dans sa situation absolue au moment de la pose. En outre, un dessin-type une fois obtenu, on peut en tirer un nombre indéfini de copies, ce qui constitue un avantage extraordinaire, et suffirait pour établir la supériorité de cette méthode sur celle qui l’a précédée. Enfin, la faculté de pouvoir substituer une feuille de papier aux plaques métalliques,