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nage en coulée de taupe a été pratiqué autrefois en Angleterre, dans les districts où se trouvent beaucoup de prairies permanentes à sous-sol argileux. Le drain ainsi exécuté est bien le plus simple de tous. Il n’y entre ni tuyaux, ni pierres, ni fascines : c’est une trace souterraine, analogue à la galerie des taupes, et que laisse, en passant dans le sol, un instrument désigné, en raison de son mode d’action, sous le nom de charrue-taupe. La partie essentielle de cet instrument est toujours un coutre de charrue extrêmement fort, terminé, à sa partie inférieure, par un cône de fer ou de fonte. Ce cône pénètre dans le sol, et si ce sol est très-compacte, il laisse derrière lui un vide que la terre ne remplit pas.

Ce n’est que dans l’argile qu’on arrive ainsi à un bon résultat. On manœuvre la charrue-taupe au moyen d’un cabestan à manége, conduit par des chevaux, et fixé à l’extrémité de la ligne de drain à ouvrir. Mais un tel mode de drainage est très-imparfait et toujours très-superficiel. Comme l’outillage est très-cher, et se détériore promptement, le prix de revient des travaux serait considérable.

Drains en gazon. — Il est une autre manière très-simple de construire des drains : on se sert de simples morceaux de gazon, enlevés de la surface du sol. Pour exécuter ce genre de saignée, on enlève d’abord une forte motte de gazon ; puis, on extrait une deuxième tranche de terre, avec une bêche un peu plus étroite ; enfin, on enlève une troisième et dernière tranche, avec une bêche très-étroite : on a ménagé ainsi deux épaulements. Cela fait, on enfonce la motte de gazon, enlevée de la superficie, jusqu’à ce qu’elle s’appuie sur les épaulements, en sorte qu’il y ait en dessous un vide qui servira de conduit. On achève de remplir avec la terre qui a été extraite.

Ce genre de travail a été employé pour l’assainissement des tourbières, en Angleterre et pour le drainage des terres fortes. Mais, pour les terrains ordinaires, il n’est que temporaire. Au reste, il ne revient pas à beaucoup meilleur marché que le drainage avec des tuyaux de poterie.

Dans le drainage des terrains tourbeux et marécageux, on a réussi à employer des tuyaux exécutés avec la tourbe elle-même, à l’aide d’un louchet, d’une forme particulière. On découpe avec cet instrument, des prismes de tourbe, percés d’une ouverture demi-cylindrique. En ajustant ces prismes d’une manière convenable, on obtient un véritable tuyau. Un ouvrier habile produit 2 000 à 3 000 de ces prismes de tourbe par jour. Avant d’être employés ils sont séchés au soleil et prennent alors une grande résistance. Mais ce système n’est applicable que très-exceptionnellement.

Drains en fascines. — On a employé en Angleterre, en France, et surtout en Allemagne, une méthode très-imparfaite, et qui avait déjà été mise en usage dans l’antiquité. Elle consiste à mettre au fond des saignées, des fagots de petit bois, de la paille, ou des perches de bois d’aune, fortement serrées les unes contre les autres.

La forme des drains de fascines varie avec les localités. Quelquefois leur section transversale est un trapèze, sur le fond duquel les fascines sont simplement posées, ou bien supportées, de distance en distance, par des croisillons en bois. D’autres fois, on ménage au fond de la tranchée, un double épaulement, sur lequel on place la fascine, qui sert seulement alors à recouvrir la petite rigole pratiquée au-dessous d’elle. Quelle que soit la disposition adoptée, on place au-dessus des fascines des gazons ou branchages légers, et les premières couches de terre sont fortement tassées au-dessus.

Au reste, on ne doit recourir aux fascines que dans des cas extrêmes, c’est-à-dire quand d’autres matériaux sont rares et coûteux. En effet, les matières végétales se décomposent assez rapidement dans les terrains