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plier davantage les puits dans le même lieu ; on en est donc réduit, à cet égard, à des tâtonnements.

Il est un principe aujourd’hui bien constaté, et sur ce principe même reposent, on peut le dire, toutes les théories des géologues. Ce principe, c’est que la température s’élève à mesure que l’on descend à l’intérieur de notre globe. Il résulte d’expériences nombreuses et diverses faites dans les mines, que l’élévation de température serait, en moyenne, de 1 degré par 33 mètres d’abaissement à l’intérieur de la terre.

On comprend, d’après cela, que les eaux fournies par les puits artésiens, doivent avoir une température d’autant plus élevée qu’elles proviennent d’une plus grande profondeur dans le sol.

Il serait trop long de signaler la température des eaux des principaux puits artésiens. Nous nous bornerons à quelques chiffres particuliers aux puits de la ville de Paris.

Les observations faites à diverses profondeurs, dans le puits de Grenelle, ont fourni les résultats suivants :

À 248 mètres 
20°
    299         
22,2
    400         
23,75
    505         
26,43
    548         
27,7

En partant des caves de l’Observatoire, dont la température constante est de 11°,7, on trouve que l’accroissement moyen jusqu’au fond du puits de Grenelle est de 1 degré pour 32m,5.

Dans un puits foré à l’École militaire, la température de l’eau a été trouvée de 16°,4 à 173 mètres de profondeur.

À la gare de Saint-Ouen, la profondeur du puits étant de 66 mètres, le thermomètre marqua 12°,9.

Enfin, à Alfort, un puits profond de 54 mètres, a fourni de l’eau à 14°. Dans un puits ordinaire, le plus profond des environs, la température de l’eau n’était que de 11°,7.

Arago, dans sa Notice sur les puits forés, a démontré que la température de l’eau des puits artésiens se maintient toujours constante. Il cite de nombreuses fontaines des départements du Nord et du Pas-de-Calais, qui n’ont pas varié d’un degré pendant des années entières. Des observations ultérieures sont venues confirmer ces premières données.

Outre leurs applications aux usages domestiques, à la salubrité publique et à l’irrigation des champs, les eaux artésiennes rendent d’utiles services à l’industrie.

Elles constituent, en premier lieu, une force motrice plus ou moins considérable, qu’on emploie, soit à faire tourner les meules d’un moulin, soit à mettre en mouvement les différentes machines d’une manufacture, par l’intermédiaire d’une roue hydraulique, soit à actionner une pompe qui doit élever de l’eau ou d’autres liquides à de grandes hauteurs. Elles ont même sur les eaux courantes un avantage considérable : celui de posséder, en tout temps, une température assez élevée, et par conséquent, de ne point arrêter les travaux par les froids les plus rigoureux. C’est pourquoi elles sont recherchées comme force motrice, même dans les contrées où les cours d’eau ne manquent pas.

Une application fort heureuse des eaux artésiennes venant des grandes profondeurs, est celle qui consiste à les faire circuler dans des tuyaux métalliques, et à les faire servir au chauffage des serres, des hôpitaux, des prisons, des grands ateliers, etc. Dans le Wurtemberg, M. Bruckmann a maintenu à + 8° la température de ses ateliers, au moyen d’un courant d’eau à + 12°, alors que la température extérieure descendait jusqu’à 18° au-dessous de zéro.

Les eaux artésiennes sont employées avec avantage dans les papeteries, à cause de leur limpidité constante. En effet, l’eau des rivières est toujours trouble après les grandes