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le pensons pas. M. Glaisher a dû se tromper sur l’estimation de la hauteur maximum qu’il a atteinte. Nous n’avons pas vu, du reste, que cette estimation ait jamais été appuyée sur des documents certains, provenant des observations de M. Glaisher.

Lorsque, à trois heures et quart environ, M. Tissandier revint à lui, il était à 6 000 mètres de hauteur, et ses deux malheureux compagnons étaient morts. C’est donc dans la deuxième montée, qui correspond à la jetée de l’aspirateur, pesant 17 kilogrammes, que moururent Sivel et Crocé-Spinelli. Ainsi, il y eut deux perturbations organiques, dues à la raréfaction de l’air, en un temps très court. Comment s’étonner alors de la catastrophe qui en résulta ? Ce qui étonne, c’est que M. Tissandier ait survécu. Son tempérament, différent de celui de ses deux compagnons, en est sans doute la cause.


Comment obvier, à l’avenir, aux dangers qui sont inhérents aux voyages aériens à de grandes hauteurs ? C’est là une question que chacun se pose, mais qu’il est bien difficile de résoudre.

Certainement, une provision d’oxygène est une excellente précaution ; mais on a vu qu’elle est loin de suffire, puisque à 7 000 mètres les mouvements de l’expérimentateur sont empêchés à ce point qu’il ne peut saisir le tube aspirateur qui est fixé aux sacs pleins d’air vital. Il importerait donc de mettre l’aéronaute à l’abri de l’action de l’air raréfié, en conservant, si cela est possible, autour de lui, une pression normale ou à peu près normale, c’est-à-dire peu différente de celle de la surface du sol.

M. Denayrouse a proposé d’appliquer le scaphandre du plongeur sous-marin à composer une armature dans laquelle le corps de l’aéronaute serait enveloppé, et qui renfermerait de l’air à la pression ordinaire, c’est-à-dire ne communiquant pas avec le milieu ambiant. Mais cet appareil n’a pas encore été construit. Serait-il en toile, comme celui du plongeur ? Évidemment non. On le fabriquerait en métal, dit M. Denayrouse. L’aéronaute serait donc placé dans une espèce de tonneau, avec des vitres aux yeux, comme le plongeur sous-marin. Mais comment pourrait-il se servir de ses bras, ainsi enfermé de toutes parts dans une caisse de métal ? On promènerait dans les airs une véritable momie, avec cette cage de fer.


Arrivons à l’exposé qu’a fait M. Gaston Tissandier, devant l’Académie des sciences, des quelques résultats scientifiques de l’expédition si malheureusement terminée. Voici le résumé de sa communication.

Les observations thermométriques ont donné une décroissance de la température jusqu’à la hauteur de 8 000 mètres. En partant, le thermomètre indiquait à la surface du sol 14 degrés au-dessus de zéro ; le zéro était atteint à 4 387 mètres. Il y avait — 10 degrés à 7 000 mètres et — 11 à 7 400 mètres. À la première montée, la température intérieure était de + 19 degrés au centre et de + 22 près de la soupape à une altitude de 4 600 et 5 000 mètres.

L’ascension eut lieu rapidement. La température des couches d’air décroît, tandis que celle du ballon reste à peu près stationnaire, ce qui diminue sa force ascensionnelle. Les voyageurs réservaient leurs forces pour les régions les plus élevées, sans soupçonner le dénouement funeste qui les attendait. En ce qui concerne les effets de l’ascension sur la circulation, à 4 602 mètres il y avait 110 pulsations à la minute ; à 5 300 mètres M. Sivel en comptait 155, avec + 37 degrés 9 dixièmes pour la température de sa bouche. À terre, M. Crocé-Spinelli comptait 74 pulsations ; M. Sivel, 76 à 86, et M. Gaston Tissandier, 70 à 80.

Au delà de 5 000 mètres, Crocé-Spinelli a signalé l’absence de la vapeur d’eau dans l’air. Le ciel était bleu et limpide ; une