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affût à quatre roues est également en usage sur nos navires. Ce canon est en acier ; il pèse 43 000 kilos, et tire, avec une charge de poudre prismatique de 113 kilos, un obus qui pèse 345 kilos, sous une vitesse initiale de 550 mètres ; tandis que le canon de 32 employé par l’artillerie de terre pour la défense des côtes ne pèse que 35 000 kilos, et lance un projectile de 345 kilos également, avec une vitesse initiale de 421 mètres seulement. Ce dernier canon ne diffère pas lui-même de la bouche à feu que nous avons représentée dans le Supplément à l’artillerie moderne.

L’obus de rupture, lancé par ces grosses pièces, est en acier ; il ne porte pas de fusée, mais il contient une charge de 2 kilos 600 de poudre. Quand l’obus heurte la cuirasse d’un navire, la chaleur développée suffit à déterminer l’inflammation de la charge intérieure de l’obus, lequel en éclatant perce la cuirasse ou l’endommage considérablement. On remplit d’ailleurs maintenant les obus de rupture avec de la dynamite.

Un canon de plus gros diamètre qui a 42 centimètres à la bouche est également installé dans nos batteries. Il est en acier et pèse 75 800 kilos. Il tire, avec une charge de 274 kilos de poudre prismatique, un obus qui pèse 780 kilos et qui est animé d’une vitesse initiale de 530 mètres. À bout portant, ce projectile traverse, de part en part, une cuirasse de 850 millimètres d’épaisseur !

La plupart de ces gros canons sont placés à l’avant ou à l’arrière des navires, dans des tourelles cuirassées, analogues par leur structure et leur mode de révolution sur leur axe, à celles que nous avons décrites dans notre Supplément à l’Artillerie moderne[1].

Les autres sont installés dans les batteries qui sont, d’ailleurs, protégées également par la cuirasse.

On voit dans la figure 252 un de ces canons dans la batterie d’un navire de guerre, le Richelieu.

Outre ces gros canons, la marine française possède des canons à tir rapide, qui ont pour but de protéger les cuirassés contre l’attaque des bâtiments plus légers, des torpilleurs en particulier, et qui servent aussi à l’armement des canonnières destinées à remonter jusqu’assez loin le long des fleuves.

Voici quelques renseignements numériques sur ces canons :

  POIDS du canon. POIDS de l’obus. VITESSE initiale.
  kilogr. kilogr. mètres.
Canon de 10 centimètres 
2 100 13 760
Canon de 12 centimètres 
3 300 21 760
Canon de 15 centimètres 
6 300 40 760

Mais, hâtons-nous de le dire, il se produit, depuis quelque temps, une réaction prononcée contre les canons à très gros calibre. Il est évident que si l’on est forcé, pour répondre à l’accroissement de l’épaisseur du blindage, d’augmenter indéfiniment la puissance des pièces d’artillerie, les mouvements des grands cuirassés deviendront de plus en plus lents, et d’une évolution de plus en plus difficile. Qu’arrivera-t-il alors ? Un croiseur, de dimensions restreintes, pourvu de canons à tir rapide, et qui lancera des projectiles remplis de substances explosives, pourra jouer un rôle plus important que celui des cuirassés. Pour ne citer qu’un seul exemple à l’appui de cette opinion, le Lepanto, cuirassé italien, porte jusqu’à 4 canons de 103 tonnes, et en outre, toute une batterie de canons de 16 centimètres. Mais le tir des canons de 103 tonnes est fort lent ; le poids énorme des projectiles, et celui des gargousses, nécessite de nombreux mécanismes auxiliaires, pour effectuer le

  1. Pages 227-228.