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torpille, qui éclate dès qu’elle est en contact avec la muraille de l’ennemi.

La gerbe d’eau produite par l’explosion, recouvre parfois complètement le bateau torpilleur qui serait coulé à fond si toutes les issues n’en étaient fermées, de manière à en faire une véritable bouée.

Il paraît extraordinaire que l’explosion ne soit pas aussi dangereuse pour l’assaillant que pour son adversaire. Pour le comprendre, il faut se rappeler que la matière explosive dont sont chargées les torpilles, c’est-à-dire le fulmi-coton, est extrêmement brisante, qu’elle fait brèche dans la cuirasse la plus résistante lorsqu’elle est en contact avec elle, mais qu’à une distance de quelques mètres, on n’en ressent d’autre effet que la commotion transmise par le liquide. C’est pour cela que l’intervalle d’une douzaine de mètres représenté par la hampe suffit pour protéger le torpilleur.

Il n’en est pas moins vrai que l’attaque d’un cuirassé, par un bateau armé d’une torpille portée, est une opération très périlleuse, qui exige des hommes déterminés, d’un sang-froid, d’un courage et d’une expérience à toute épreuve.

La marine française fait également usage de la torpille Whitehead, que nous avons décrite avec tous les détails nécessaires. La torpille Whitehead se compose, comme nous l’avons dit (page 327), d’un cylindre métallique, effilé aux deux bouts et contenant non seulement la charge de fulmi-coton, mais une machine à air comprimé, qui fait fonctionner deux hélices. C’est un véritable petit navire sous-marin, qui se meut de lui-même dans la direction où on l’a lancé, et à une profondeur réglée d’avance par un appareil spécial. La torpille Whitehead se loge, comme on l’a vu (fig. 269, page 328), dans un tube situé à l’avant du bateau torpilleur, et d’où on la chasse au moyen de l’air comprimé. Une fois lancée, elle s’immerge à la profondeur pour laquelle on l’a réglée, et chemine entre deux eaux, jusqu’au but, où le choc de sa pointe détermine l’explosion. Le navire torpilleur peut ainsi opérer à distance et éviter les dangers d’un contact immédiat avec l’ennemi.

Malheureusement, cet avantage est compensé par des inconvénients graves. D’abord, chaque torpille Whitehead coûte fort cher, environ 10 000 francs ; ensuite son action est incertaine, car les courants un peu forts la font dévier de la direction qu’on a voulu lui imprimer.

Quoi qu’il en soit, tous nos ports militaires sont munis de flottilles de torpilleurs ; et d’écoles où les officiers et les hommes chargés de ce service sont soumis à de fréquents exercices sur les torpilles portées et les torpilles Whitehead.

Des canonnières de différents types dont nous avons décrit les plus récentes, c’est-à-dire celles qui sont destinées à naviguer avec sécurité et rapidité sur les fleuves et les rivières du Tonkin et de la Cochinchine, complètent l’effectif de la flotte militaire française.

Une considération particulière relative à nos bâtiments de guerre.

Autrefois, c’est-à-dire au temps de la marine à voile, nos bâtiments étaient désarmés, en temps de paix. Mais, en cas de déclaration de guerre, il fallait des mois entiers pour armer un navire. Sans chemins de fer, sans machines à vapeur, sans même de bonnes routes terrestres, un temps considérable était nécessaire pour faire arriver dans un port de guerre le matériel destiné à armer un navire ; de sorte que les combats d’escadre ne pouvaient commencer que longtemps après la déclaration de guerre. Aujourd’hui, on maintient dans nos ports militaires les navires tout armés et prêts à prendre la mer. Si bien que quatre ou cinq jours après la déclaration de guerre, cuirassés et croiseurs seraient en état de se