Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 6.djvu/539

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

travailler dans une chambre voisine de la salle à manger.

Ce fait montre tout à la fois les difficultés d’un diagnostic précis, en pareil cas, et l’ignorance où l’on est encore de tous les accidents pouvant résulter de l’empoisonnement lent par l’oxyde de carbone, empoisonnement qui ne manque jamais de se produire chez les personnes qui séjournent dans des pièces chauffées par un poêle mobile, alors même qu’il marche aussi bien que possible.

Aussi, d’accord avec le Dr Léon Colin, M. Lancereaux serait-il d’avis de proscrire le poêle à combustion lente partout où il y a agglomération de personnes, surtout si ces personnes sont jeunes : particulièrement dans les crèches, les écoles, les pensionnats, les lycées, les ateliers, les casernes et les hôpitaux.

On dit souvent que les poêles mobiles sont des appareils délicats, exigeant, de la part de ceux qui les emploient, une certaine attention, mais qu’ils ne présentent, finalement, pour des gens soigneux et attentifs, aucun danger ; et que, par conséquent, il suffit, pour éviter tout accident, d’adresser au public quelques instructions sur leurs inconvénients. On ne peut nier pourtant que ces poêles ne soient des producteurs puissants d’oxyde de carbone, c’est-à-dire d’un gaz éminemment nuisible à la santé et insidieusement toxique, même à très faible dose. S’il en est ainsi, les faits rapportés plus haut, desquels il résulte que des cheminées construites d’après le système unitaire, détériorées, ou présentant un vice de construction ignoré jusque-là, et même bien construites, mais soumises tout à coup à un changement brusque de l’atmosphère, peuvent être l’occasion de graves accidents, dans la partie d’une habitation plus ou moins distincte et éloignée de celle où fonctionne un poêle mobile, ne doivent-ils pas conduire à la conclusion que ce poêle, en raison même de son mode de construction, est un appareil qui exige des conditions d’installation spéciales, du moins en ce qui concerne les maisons à loyers comportant de nombreux logements ?

Cette conclusion est celle à laquelle on est obligé de s’arrêter. Éclairer le public sur le danger des poêles mobiles, ne suffirait pas à faire disparaître les cas d’empoisonnement par ces appareils. Il y a donc, lieu d’appeler l’attention des pouvoirs publics sur les dangers du poêle à combustion lente, non seulement pour les personnes qui s’en servent, mais encore pour les voisins.

Cette dernière communication du Dr Lancereaux avait épuisé le sujet. Dans la même séance, l’Académie de médecine vota les conclusions qui exprimaient l’opinion à peu près unanime de ses membres, sur cette importante question d’hygiène publique.

Voici le texte de ces conclusions :

1° Il y a lieu de proscrire formellement l’emploi des appareils dits poêles économiques, à faible tirage, dans les chambres à coucher et dans les pièces adjacentes.

2° Dans tous les cas, le tirage d’un poêle à combustion lente doit être convenablement garanti par des tuyaux ou cheminées d’une section et d’une hauteur suffisantes, complètement étanches, ne présentant aucune fissure ou communication avec les appartements contigus, et débouchant au-dessus des fenêtres voisines. Il est utile que ces cheminées ou tuyaux soient munis d’appareils sensibles indiquant que le tirage s’effectue dans le sens normal.

3° Il est nécessaire de se tenir en garde, principalement dans le cas où le poêle en question est en petite marche, contre les perturbations atmosphériques qui pourraient venir paralyser le tirage et même déterminer un refoulement des gaz à l’intérieur de la pièce.

4° Tout poêle à combustion lente qui présente des bouches de chaleur devra être rejeté ; car celles-ci suppriment l’utilité de la chambre de sûreté, constituée par le cylindre creux intérieur, compris entre les deux enveloppes de tôle ou de fonte,