Page:Filion - À deux, 1937.djvu/40

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 38 —

tôt un foyer à nous, et nous aurons des meubles à nous, un salon qui portera les traces de notre goût. Il en était là de ses réflexions, quand la porte, poussée du dehors, laissa passer la fine silhouette de la jeune fille, il s’avança, la main tendue :

— Bonjour Laure, vous avez bien dormi. Nous allons dîner en ville si vous n’avez pas d’objection.

En même temps il lui tendait la boite de chocolat achetée à son intention.

Elle avait son manteau de fourrure, son petit chapeau brun, ses boucles folles ; sous son manteau, une robe de crêpe bleu pâle.

Elle grimpa les escaliers en vitesse, déposa son livre de prières sur l’unique meuble de sa chambre et redescendit toute rosée de la course.

Ils se placèrent au restaurant dans un endroit très en vue, c’était Alexandre qui avait choisi. Il voulait surtout que la beauté de sa compagne fut admirée.

De son petit doigt fuselé qui était encore celui d’une enfant, elle indiquait sur le menu ce qu’elle préférait et Alexandre inconsciemment commandait la même chose. Il s’aperçut, tout à coup, que le serveur venait de déposer devant lui une assiette sur laquelle il y avait de la dinde.

Elle eut l’intuition de sa contrariété :

— On ne vous a pas servi ce que vous aviez demandé ?

— Plutôt je crois avoir commandé quelque chose que je n’aime pas manger.

Ils rirent tous deux de bon cœur.