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lui prodiguait pour ses menues dépenses ; elle était même très généreuse, elle avait travaillé de ses mains pour les œuvres de charité ; mais elle n’avait jamais vu ce que c’était qu’un taudis ce que c’était que la misère doublée d’un manque total d’éducation.

Madame des Orties téléphona au président de la section Saint-Vincent de Paul de sa paroisse, celui-ci promit de faire une enquête. Elle se mit en communication avec l’épicier chez lequel elle avait l’habitude de s’approvisionner, énuméra divers articles à être envoyés dans cette maison, et demanda que la facture lui fût remise. Pierrette fit venir de la laine noire afin de tricoter des bas pour le garçonnet qu’elle avait vu pieds nus dans la froidure.

Quinze jours plus tard, le Monsieur auquel Madame des Orties s’était adressée, l’appela :

— Informations prises, dit-il, nous n’avons jamais voulu donner de secours réguliers dans cette maison. Le père est un fieffé coquin, paresseux, débauché et buveur. Les femmes ne valent pas beaucoup mieux. Elles vont, c’est vrai, faire des journées chez les dames, mais ni l’une ni l’autre n’est d’une probité recommandable. Le soir, au lieu de s’occuper de leurs enfants, elles sortent, et Dieu sait où elles vont. Toutefois, comme il y a une malade nous lui ferons porter de la nourriture. L’aîné des petits garçons serait capable de travailler, il préfère mendier, et va ensuite au cinéma avec l’argent qu’il arrache à la pitié des passants.

Madame des Orties restait atterrée. Elle ne connaissait rien des dessous et des derniers degrés de l’échelle sociale. Mariée jeune à un homme intègre et à l’aise, elle avait vécu toute sa vie dans un réel enchantement. Après la mort de son mari, elle s’était occupée uniquement de sa fille, et c’était encore un caprice de cette enfant qui l’avait conduite dans cette demeure.

Elle se promit bien d’y retourner, mais sans amener Pierrette.

C’était à l’approche des fêtes, et la jeune fille courait les magasins, achetant des cadeaux. Cependant cha-