Page:Firmin - De l’égalité des races humaines.djvu/211

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perd aujourd’hui tout son prestige des premiers temps, prestige devant lequel on s’inclinait si respectueusement. « Bien peu de linguistes, dit M. de Rosny osent encore présenter les langues de notre Europe, comme des filles d’une langue qui aurait été le sanscrit ou bien cet idiome hypothétique et quelque peu fantaisiste qu’on appelle aryague. Je qualifie cet idiome d’hypothétique, parce qu’il ne repose en somme sur la connaissance d’aucun texte, d’aucune inscription, d’aucun mot réellement historique, mais seulement sur la supposition que quelques racines anciennes des langues aryennes ont appartenu peut-être à une langue perdue de laquelle seraient dérivées toutes celles qui constituent le groupe qui nous occupe. Je pourrais ajouter que le nom même de cette langue est inconnu dans l’histoire et ne doit son origine qu’à une invention tout à fait moderne et d’une moralité scientifique encore fort douteuse.

La seule doctrine établie c’est que le sanscrit, le persan, le grec, le latin, les langues germaniques et les langues slaves, renferment un nombre considérable d’éléments communs tant lexicographiques que grammaticaux, et que le fait d’emprunt ne saurait être contesté. Mais une foule de langues ont fait à d’autres langues des emprunts considérables sans qu’il y ait pour cela la moindre parenté originaire[1]. »

L’unité d’origine des langues indo-européennes une fois rompue, on est forcément amené à ne voir dans les divers idiomes connus que l’expression sociale des peuples qui s’en servent, c’est-à-dire que le degré de perfection plus ou moins caractérisée de ces idiomes est adéquat au degré de civilisation de ces peuples. Cette thèse, il est vrai, parait inconciliable avec la théorie de l’évolution morpholo-

  1. Congrès intern. des sciences ethnogr., etc., p. 114.