Page:Firmin - De l’égalité des races humaines.djvu/217

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En laissant la construction logique de la phrase, on peut encore faire une remarque sur la conjugaison du verbe être. C’est le verbe par excellence, puisqu’au point de vue psychologique, on ne peut concevoir l’énonciation d’aucune idée, d’aucune pensée, sans y impliquer ce verbe, le seul qui subsiste par lui-même, en exprimant l’affirmation. La conjugaison d’un tel verbe ou le rôle qu’il joue dans la conjugaison des autres verbes, dans une langue quelconque, doit avoir une certaine relation psychologique avec le mode de conception des peuples parlant cette langue. Eh bien, une particularité fort curieuse existe là-dessus dans l’allemand et l’italien qui se distinguent, sous ce rapport, de tout le groupe linguistique de l’Europe occidentale. En ces deux langues, au lieu d’employer l’auxiliaire avoir, exprimant l’action, dans les temps composés du verbe être, ce sont les temps correspondants de ce verbe même qui en tiennent lieu. — En français, on dit : « j’ai été » ; en anglais, « I have been » ; en espagnol, « yo he sido ou he estado » ; mais en allemand et en italien, on dit : ich bin gewesen et io sono stato, c’est-à-dire je suis été. Or, au point de vue ethnologique, il n’y a pas de doute que les Italiens sont à une plus grande distance des Allemands que les Anglais. Sans doute, il y a une certaine compensation au point de vue lexicologique. Il y a peut-être plus du tiers des mots anglais dont la forme diffère si peu des mots allemands que la science la plus élémentaire des permutations linguistiques suffit pour les transformer les uns en les autres. Au point de vue de la construction grammaticale, pourtant, et pour l’ordre syntaxique de la phrase, l’anglais se rapproche beaucoup plus des langues d’origine latine et surtout du français.

Ce sont des faits qui prouvent sur abondamment que les langues, dans ce qu’elles ont d’essentiel, s’adaptent mieux au caractère social, à la civilisation qu’à la race. Le peuple