Page:Firmin - De l’égalité des races humaines.djvu/49

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

temps pour voir sa théorie se répandre et gagner les esprits.

C’était d’ailleurs une époque de réaction confuse et d’anarchie spirituelle, comme disait Auguste Comte. Charles X avait remplacé Louis XVIII sur le trône de France. L’esprit conservateur, dans une recrudescence qui annonce une fin prochaine, se ramassait dans un suprême effort. Appuyé sur la Sainte Alliance qui craquait de tous côtés, au choc des compétitions dynastiques de l’Espagne, des turbulences des Italiens se transformant en irrédentistes, de l’indiscipline fanatique du Tugenbund allemand et des machinations du Carbonarisme, mais soutenu aussi par les fortes épaules de Metternich, l’ancien régime acculé à ses derniers retranchements semblait se cabrer pour dire à la Révolution : tu n’iras pas plus loin ! » En même temps, on voyait à l’autre pôle social tous les démolisseurs s’acharner à l’œuvre de rénovation commencée par les encyclopédistes, enrayée par Bonaparte, mais s’acheminant lentement, souterrainement, pendant les tâtonnements et les maladresses de la restauration bourbonienne. Dans ces périodes de transition, où la fièvre enflamme les esprits, toute idée excentrique, toute théorie neuve s’empare bien vite des intelligences et s’y installe sans difficulté, aussi éphémère qu’en soit la vogue.

Bory de Saint-Vincent fit donc sensation lorsqu’il eut exposé sa nouvelle classification du genre humain.

L’auteur de L’homme, tout en se rangeant parmi ceux qui admettent la pluralité des espèces humaines, critique pourtant la classification de Virey. Cela se comprend. Les deux espèces que Virey distingue par les degrés d’ouverture de l’angle facial, sont divisées en six races. Ces six races sont non-seulement érigées en espèces par Bory de Saint-Vincent, mais encore subissent des subdivisions qui constituent autant d’espèces dans la taxonomie de notre