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LA CROYANCE À LA FIN DU MONDE

courtisans crurent qu’il fallait honorer son agonie d’un prodige, et lui dirent qu’il paraissait une grande comète qui leur faisait peur. Il eut la force de se moquer d’eux, et leur dit plaisamment que la comète lui faisait trop d’honneur. En vérité, on devrait en dire autant que lui, et l’orgueil humain se fait aussi trop d’honneur de croire qu’il y ait de grandes affaires dans les astres quand on doit mourir. »

On le voit, les comètes perdaient insensiblement leur prestige. Nous lisons toutefois dans un traité de l’astronome Bernouilli cette remarque assez bizarre : « Si le corps de la comète n’est pas un signe visible de la colère de Dieu, la queue pourrait bien en être un. »

La peur de la fin du monde fut encore associée à l’apparition des comètes en 1773 ; une terreur panique envahit l’Europe et même Paris. Voici ce que chacun peut lire dans les Mémoires secrets de Bachaumont :

6 mai 1773. — Dans la dernière assemblée publique de l’Académie des sciences, M. de Lalande devait lire un mémoire beaucoup plus curieux que ceux qui ont été lus ; ce qu’il n’a pu faire par défaut de temps. Il roulait sur les comètes qui peuvent, en s’approchant de la Terre, y causer des révolutions, et surtout sur la plus prochaine, dont on attend le retour dans dix-huit ans. Mais, quoiqu’il ait dit qu’elle n’est pas du nombre de celles qui peuvent nuire à la Terre et qu’il ait d’ailleurs observé qu’on ne saurait fixer l’ordre de ces événements, il en est résulté une inquiétude générale.

9 mai. — Le cabinet de M. de Lalande ne désemplit