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LA FIN DU MONDE

toire des comètes. Pour ne parler un instant que des modernes, l’une des dernières éclipses totales de soleil dont la zone ait traversé la France, celle du 12 août 1654, avait été annoncée par les astronomes, et cette annonce avait été suivie d’une immense terreur. Pour l’un, elle présageait un grand bouleversement des États et la ruine de Rome ; pour l’autre, il s’agissait d’un nouveau déluge universel ; pour un troisième, il n’en devait résulter rien moins qu’un embrasement du globe ; enfin, pour les moins exagérés, elle devait empester l’air. La croyance en ces effets tragiques était si générale que, sur l’ordre exprès des médecins, une multitude de gens épouvantés se renfermèrent dans des caves bien closes, chauffées et parfumées, pour se mettre à l’abri de l’influence pernicieuse. C’est ce qu’on peut lire notamment dans les Mondes de Fontenelle, 2e soirée. « N’eûmes-nous pas belle peur, écrit-il, à cette éclipse qui, à la vérité, fut totale ? Une infinité de gens ne se tinrent-ils pas renfermés dans des caves ? Et les philosophes, qui écrivirent pour nous rassurer, n’écrivirent-ils pas en vain ou à peu près ? Ceux qui s’étaient réfugiés dans les caves en sortirent-ils ? » Un autre auteur du même siècle, P. Petit, dont nous parlions tout à l’heure, raconte dans sa « Dissertation sur la nature des comètes », que la consternation augmenta de jour en jour jusqu’à la date fatale, et qu’un curé de campagne, ne pouvant plus suffire à confesser tous ses paroissiens qui se croyaient à