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LA FIN DU MONDE

nérés, comme si elle était sortie de la terre fécondée par un nouveau déluge, et qui, de nouveau, transforma la face du monde.

De nouvelles civilisations se succédèrent, flux et reflux de l’immense marée de l’histoire humaine. La matière s’humilia peu à peu sous la domination ascendante de l’esprit.

Les travailleurs intellectuels, pour lesquels les journées passent si vite, étaient parvenus à allonger de deux heures, sans fatigue nouvelle, le temps qu’ils consacraient aux recherches utiles à l’humanité, en prenant ces deux heures aux hommes sans valeur intellectuelle qui demandent à « tuer le temps ». D’un commun accord, les premiers s’étaient créé des journées de vingt-six heures et les seconds des journées de vingt-deux, en ce sens que les premiers ne dormaient plus que six heures au lieu de huit, tandis que les seconds dormaient dix heures, pendant lesquelles d’habiles praticiens leur soutiraient, en une imperceptible opération de quelques secondes, une certaine dose de force virile qu’ils transfusaient dans les artères des premiers. C’est comme s’ils avaient tous dormi huit heures ; mais il y avait réellement deux heures de gagnées en faveur des hommes utiles.

Le huitième sens surtout, le sens psychique, jouait un grand rôle dans les relations humaines.

Le développement des facultés intellectuelles de l’homme, la culture des études psychiques avaient complètement transfiguré notre race. On avait dé-