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LA FIN DU MONDE

médecine, de la pharmacie et même de la chirurgie. La télépathie était devenue une science vaste et féconde.

L’humanité avait atteint un degré de raison suffisant pour vivre tranquillement et avec esprit. Les efforts de l’intelligence et du travail avaient été appliqués à la conquête de nouvelles forces de la nature et au perfectionnement constant de la civilisation. Insensiblement, graduellement, la personne humaine avait été transformée, ou, pour mieux dire, transfigurée.

Les hommes étaient presque tous intelligents. Ils se souvenaient, en souriant, des ambitions enfantines de leurs aïeux, à l’époque où, au lieu d’être « quelqu’un », chacun cherchait à être « quelque chose » : député, sénateur, académicien, préfet, général, pontife, directeur de ceci ou de cela, grand-croix d’un hochet national, etc., et combattait si fiévreusement dans la lutte des apparences. Ils avaient enfin compris que le bonheur est dans l’esprit, que l’étude est la plus haute satisfaction de l’âme, que l’amour est le soleil des cœurs, que la vie est courte et ne mérite pas qu’on s’attache à l’écorce, et tous étaient heureux dans l’indépendance de la pensée, sans souci des fortunes que l’on n’emporte pas.

Les femmes avaient acquis une beauté parfaite, avec leurs tailles affinées, si différentes de l’ampleur hellénique, leur chair d’une translucide blancheur, leurs yeux illuminés de la lumière du rêve,