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APRÈS LA FIN DU MONDE

Loin d’être éternelle, la Terre où nous vivons a commencé. Dans l’éternité, cent millions d’années, un milliard d’années ou de siècles sont comme un jour : il y a l’éternité avant et l’éternité après, et la longueur apparente de la durée s’évanouit pour se réduire à un point. L’étude scientifique de la nature et la connaissance de ses lois nous ramènent donc à la question autrefois posée par les théologiens, qu’ils s’appellent Zoroastre, Platon, saint Augustin ou saint Thomas d’Aquin, ou que ce soit un naïf séminariste tonsuré de la veille : « Qu’est-ce que Dieu faisait avant la création du monde et que fera-t-il après sa fin ? » ou, sous une forme moins anthropomorphique, puisque Dieu est inconnaissable : « Quel était l’état de l’univers antérieurement à l’ordre actuel des choses et que sera-t-il après ? »

La question est la même, soit que l’on admette un Dieu personnel, raisonnant et agissant dans un certain but, soit que l’on n’admette l’existence d’aucun esprit dans la nature, mais seulement des atomes indestructibles et des forces représentant une quantité d’énergie invariable et non moins indestructible. Dans le premier cas, pourquoi Dieu, puissance éternelle et non créée, serait-il resté d’abord inactif, ou, étant resté inactif, satisfait de son immensité absolue que rien ne peut accroître, pourquoi aurait-il changé cet état et aurait-il créé la matière et les forces ? Le théologien peut répondre : « Parce que cela lui a fait plaisir. » Mais le