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Page:Flammarion - La Planète Mars et ses conditions d’habitabilité, tome 2, 1909.djvu/324

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LA PLANÈTE MARS.

devrait correspondre aux époques de minimum de distance, c’est-à-dire aux oppositions. Or, de juillet 1896 à février 1897, ces lignes n’ont, en général, ni gagné ni perdu de leur visibilité. Lorsqu’en décembre la planète mesurait 17″ de diamètre, elles n’étaient ni plus larges ni mieux visibles qu’en juillet, où le diamètre n’était que de 7″. Plusieurs canaux qui, même en décembre, étaient d’une extrême finesse, paraissaient plutôt élargis en février, quoique le disque fût réduit de moitié. L’impression que l’observateur a gardée est que la largeur angulaire de ces lignes est la même pour un disque de 7″ que pour un de 17″. Ce ne sont donc pas là, selon lui, des lignes matérielles d’une grandeur définie.

Peut-être pourrait-on riposter à ce raisonnement que si ces lignes sont d’une extrême finesse, à la limite de la visibilité, au-dessous de toute mesure, elles ne sont vues que dans les instants de parfaite transparence atmosphérique, et toujours comme simples impressions sur la rétine, beaucoup plus larges qu’elles le sont en réalité, et que, dans ce cas, leur largeur ne doit pas augmenter en raison géométrique du rapprochement.

L’auteur objecte en second lieu que si les lignes existaient réellement sur la planète on devrait les voir d’autant mieux que la rotation de la planète les amènerait plus près du méridien central. Ce fait ne se produit pas. Ainsi, entre autres, le Titan paraît très fin au méridien central, tandis qu’il se montre fort large à 30° de distance. Il en est de même des fragments que l’on distingue mieux loin du centre que tout près.

Comme conclusion théorique, M. Cerulli propose d’admettre que les canaux de Mars ne sont autre chose que des lignes de plus grande ombre perçues par l’œil à travers des régions parsemées de taches obscures, c’est-à-dire que l’œil relierait artificiellement entre elles des taches existant à la surface de la planète, mais invisibles pour nous dans leur vraie forme.

L’auteur nous avait déjà adressé l’explication suivante des canaux de Mars comparés à certaines lignes lunaires[1] :

Alors que le disque de Mars nous paraît le plus riche en lignes (quelques mois après l’opposition), la distance de cette planète à la Terre n’est guère inférieure à 300 fois celle de la Lune. Si nous employons alors, à l’examen de Mars, un télescope grossissant 600 fois — limite extrême que les aréographes n’atteignent presque jamais — la distance de Mars nous paraîtra réduite à 300/600, soit la moitié de la distance de la Lune. L’étude de Mars, à l’aide du télescope le plus puissant, se fera donc dans des conditions identiques à celles où a lieu l’étude de la Lune, observée avec une simple jumelle de théâtre, qui grossit seulement deux fois.

Cela posé, si nous dirigeons une jumelle sur la Lune, un phénomène curieux

  1. Bulletin de la Société Astronomique de France, 1898, p. 210.