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Page:Flammarion - Mémoires biographiques et philosophiques d'un astronome, 1912.djvu/79

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mémoires d’un astronome

pays, j’avais remarqué que les habitants de Montigny-le-Haut étaient assez fiers, et regardaient « de haut » ceux de Montigny-le-Bas. Où la vanité va-t-elle se nicher ? Rivalités de fourmis sur peu d’espace, eût dit Sénèque. Et pourtant, le fait s’explique un peu par la situation. Et puis, le plateau supérieur est forcément plus aéré, plus ensoleillé, moins humide, plus propre, que la région inférieure. J’ai dit, me semble-t-il, que ma maison natale est sur le versant oriental de la colline, à peu près à mi-côte.

Mes parents, qui faisaient leurs emplettes de commerce à Langres, m’y emmenaient quelquefois. On partait avant le lever du soleil et, en arrivant dans la matinée, on admirait d’en bas la haute ville blanche illuminée dominant les remparts. Ma mère ne négligeait aucune circonstance pour émouvoir ma pensée par le spectacle des grandes cérémonies religieuses. C’est ainsi qu’en 1852, un nouvel évêque ayant été nommé à Langres, j’assistai à son entrée solennelle d’une fenêtre d’une maison située à la porte des Moulins, appartenant à un parent du beau-frère de mon père. Journée superbe. Le canon tonna, annonçant l’arrivée de Mgr Jean-Jacques-Marie-Antoine Guérin, qui venait d’être sacré à Dijon. Un reposoir attendait Sa Grandeur. Elle descendit noblement de calèche, fut reçue par les autorités, le préfet, le général, le clergé, etc., et la procession se mit en marche vers la cathédrale, escortée d’un brillant appareil militaire. Mitre en tête, crosse en main, l’évêque s’avançait d’un pas majestueux, en donnant de la main levée des bénédictions à gauche et à droite sur le peuple pieusement agenouillé. On arriva à la cathédrale au son des cloches. Roulement majestueux