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DE GUSTAVE FLAUBERT.

Encore adieu et encore un baiser sur ta bouche où je puise ton âme.

Si tu ne m’envoies pas la statuette avec les livres, tu peux bien ne pas mettre sur la boîte : Envoi de Pr[adier].


127. À LA MÊME.
Entièrement inédite.
[24 août 1846.] — Lundi soir.

Je ne pourrai t’écrire demain, chère bien-aimée, ni peut-être après demain ; mais vendredi au plus tard (je tâcherai que ce soit jeudi), tu recevras de moi une longue lettre.

Nous partons demain matin (je ferai en sorte que ce ne soit qu’après l’arrivée du facteur), pour un petit voyage, à neuf lieues d’ici, d’où nous ne reviendrons que mercredi dans la nuit. Nous allons visiter quelques anciennes abbayes gothiques, Jumièges où est enterrée Agnès Sorel, Saint Wandrille, etc. Je penserai à toi pendant ce voyage, je te regretterai. Si tu savais comme mes jours sont longs et comme mes nuits sont froides maintenant, veuves qu’elles sont de toute félicité d’amour !

Je ne fais rien, je ne lis plus, je n’écris plus, si ce n’est à toi. Où est ma pauvre et simple vie de travail d’autrefois ? Je dis autrefois parce que c’est déjà loin. Je ne la regrette pas, parce que je ne regrette rien. Cela comme tu le dis est dans mon système. Si c’est arrivé, c’est que cela devait être. Et puis je goûte dans ta pensée tant de douceur, je retourne avec un charme si profond ton souvenir