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DE GUSTAVE FLAUBERT.

je m’ennuie, que je m’ennuie ! Mais cette fois dépasse toutes les autres ! Voilà pourquoi je redoute tant les interruptions dans la pioche ! Je ne pouvais faire autrement, cependant. Je me suis trimbalé aux Pompes funèbres, au Père-Lachaise, dans la vallée de Montmorency, le long des boutiques d’objets religieux, etc[1].

Bref, j’en ai encore pour quatre ou cinq mois. Quel bon « ouf » je pousserai quand ce sera fini, et que je ne suis pas près de refaire des bourgeois ! Il est temps que je m’amuse.

J’ai vu Sainte-Beuve et la princesse Mathilde, et je connais à fond l’histoire de leur rupture, qui me paraît irrévocable. Sainte-Beuve a été indigné contre Dalloz et est passé au Temps. La Princesse l’a supplié de n’en rien faire. Il ne l’a pas écoutée. Voilà tout. Mon jugement là-dessus, si vous tenez à le savoir, est celui-ci : le premier tort est à la Princesse, qui a été vive ; mais le second, et le plus grave, est au père Beuve, qui ne s’est pas conduit en galant homme. Quand on a pour ami un aussi bon bougre, et que cet ami vous a donné trente mille livres de rente, on lui doit des égards. Il me semble qu’à la place de Sainte-Beuve, j’aurais dit : « Ça vous déplaît, n’en parlons plus ! » Il a manqué de manières et d’attitude. Ce qui m’a un peu dégoûté, entre nous, c’est l’éloge qu’il m’a fait de l’empereur ! Oui, à moi ! l’éloge de Badinguet ! — Et nous étions seuls !

La Princesse avait pris, dès le début, la chose trop sérieusement. Je le lui ai écrit, en donnant raison à Sainte-Beuve, lequel, j’en suis sûr, m’a

  1. Voir l’enterrement de M. d’Ambreuse dans l’Éducation sentimentale.