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CORRESPONDANCE

1184. À MADAME RÉGNIER.
Croisset, dimanche, 11 [juin 1871].
Chère Madame,

En revenant de Paris aujourd’hui, je trouve chez moi votre lettre du 5. Elle est gentille et aimable au delà de toute expression. Comment y répondre convenablement ?

Je suis accablé, moins par les ruines de Paris que par la gigantesque bêtise de ses habitants. C’est à désespérer de l’espèce humaine. À part notre ami d’Osmoy et Maury (le directeur des Archives), j’ai trouvé tout le monde fou, fou à lier.

Je vais tâcher de me remettre à mon Saint Antoine, afin d’oublier mes contemporains. Quant à publier ce livre, dont le sous-titre pourrait être « le comble de l’insanité », je n’y songe nullement, Dieu merci… Il faut, plus que jamais, songer à faire de l’Art pour soi, pour soi seul. Fermons notre porte et ne voyons personne.

J’ai cependant bien envie de vous voir et, au mois de juillet, quand je retournerai à Paris, je compte m’arrêter à Mantes, bien qu’il m’en coûtera beaucoup. J’aimerais mieux vous faire ma visite partout ailleurs.

Je vous baise les deux mains.