Page:Flaubert - Bouvard et Pécuchet, éd. Conard, 1910.djvu/134

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talon, il faisait mine de faucher les jarrets d’un cheval, de pointer comme à la baïonnette, d’assommer un ennemi. La veuve, intérieurement, le trouvait un rude gaillard.

Elle fut enthousiasmée par la commode en coquillages. Le chat de Saint-Allyre l’étonna beaucoup, la poire dans la carafe un peu moins ; puis, arrivant à la cheminée :

— Ah ! voilà un chapeau qui aurait besoin de raccommodage.

Trois trous, des marques de balles, en perçaient les bords.

C’était celui d’un chef de voleurs sous le Directoire, David de La Bazoque, pris en trahison et tué immédiatement.

— Tant mieux, on a bien fait, dit Mme Bordin.

Marescot souriait devant les objets d’une façon dédaigneuse. Il ne comprenait pas cette galoche qui avait été l’enseigne d’un marchand de chaussures, ni pourquoi le tonneau de faïence, un vulgaire pichet de cidre, et le Saint-Pierre, franchement, était lamentable avec sa physionomie d’ivrogne.

Mme Bordin fit cette remarque :

— Il a dû vous coûter bon, tout de même.

— Oh ! pas trop, pas trop.

Un couvreur d’ardoises l’avait donné pour quinze francs.

Ensuite elle blâma, vu l’inconvenance, le décolletage de la dame en perruque poudrée.

— Où est le mal ? reprit Bouvard, quand on possède quelque chose de beau.

Et il ajouta plus bas :

— Comme vous, je suis sûr.