Page:Flaubert - L’Éducation sentimentale éd. Conard.djvu/317

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Et il le refusa brutalement dans un billet laconique. Après quoi, il s’habilla pour se rendre à la Maison d’or.

Cisy présenta ses convives, en commençant par le plus respectable, un gros monsieur à cheveux blancs :

— Le marquis Gilbert des Aulnays, mon parrain. M. Anselme de Forchambeaux, dit-il ensuite (c’était un jeune homme blond et fluet, déjà chauve) ; puis, désignant un quadragénaire d’allures simples :

— Joseph Boffreu, mon cousin ; et voici mon ancien professeur M. Vezou (personnage moitié charretier, moitié séminariste, avec de gros favoris et une longue redingote boutonnée dans le bas par un seul bouton, de manière à faire châle sur la poitrine).

Cisy attendait encore quelqu’un, le baron de Comaing, « qui peut-être viendra, ce n’est pas sûr ». Il sortait à chaque minute, paraissait inquiet ; enfin, à huit heures, on passa dans une salle éclairée magnifiquement et trop spacieuse pour le nombre des convives. Cisy l’avait choisie par pompe, tout exprès.

Un surtout de vermeil, chargé de fleurs et de fruits, occupait le milieu de la table, couverte de plats d’argent, suivant la vieille mode française ; des raviers, pleins de salaisons et d’épices, formaient bordure tout autour ; des cruches de vin rosat frappé de glace se dressaient de distance en distance ; cinq verres de hauteur différente étaient alignés devant chaque assiette avec des choses dont on ne savait pas l’usage, mille ustensiles de bouche ingénieux ; et il y avait, rien que pour le