Page:Flaubert - L’Éducation sentimentale éd. Conard.djvu/596

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qu’aux fenêtres ; et, sur les autres côtés de l’appartement, les tapis et les rideaux pendaient droit le long des murs. Il y avait, en dessous, des gradins occupés par de vieux bonshommes qui sommeillaient. À gauche, s’élevait une espèce de comptoir, où le commissaire-priseur en cravate blanche, brandissait légèrement un petit marteau. Un jeune homme, près de lui, écrivait ; et, plus bas, debout, un robuste gaillard, tenant du commis-voyageur et du marchand de contremarques, criait les meubles à vendre. Trois garçons les apportaient sur une table, que bordaient, assis en ligne, des brocanteurs et des revendeuses. La foule circulait derrière eux.

Quand Frédéric entra, les jupons, les fichus, les mouchoirs, et jusqu’aux chemises étaient passés de main en main, retournés ; quelquefois, on les jetait de loin, et des blancheurs traversaient l’air tout à coup. Ensuite, on vendit ses robes, puis un de ses chapeaux dont la plume cassée retombait, puis ses fourrures, puis trois paires de bottines ; et le partage de ces reliques, où il retrouvait confusément les formes de ses membres, lui semblait une atrocité, comme s’il avait vu des corbeaux déchiquetant son cadavre. L’atmosphère de la salle, toute chargée d’haleines, l’écœurait. Mme  Dambreuse lui offrit son flacon ; elle se divertissait beaucoup, disait-elle.

On exhiba les meubles de la chambre à coucher.

Me Berthelmot annonçait un prix. Le crieur, tout de suite, le répétait plus fort ; et les trois commissaires attendaient tranquillement le coup de marteau, puis emportaient l’objet dans une