Page:Flaubert - Notes de voyages, I.djvu/136

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gros ventres ; suivant leur caractère individuel ils aboient aigrement ou se dérangent pour nous laisser passer. Un chien d’une autre tribu est fort mal accueilli, lorsqu’il vient dans une tribu étrangère. — Des huppes tigrées et au long bec picorent les vermisseaux entre les corps des charognes. — Les côtes du chameau, plates et fortes, ressemblent à des branches de palmier dégarnies de feuilles et courbées. — Une caravane de quatorze chameaux passe le long des arcs de l’aqueduc pendant que je suis à guetter des vautours. Le grand soleil fait puer les charognes, les chiens roupillent en digérant, ou déchiquetant tranquillement.

Après la chasse aux aigles et aux milans, nous avons tiré sur les chiens : une balle qui tombait près d’eux les faisait s’en aller lentement sans courir. Nous étions sur un mamelon, eux sur un autre ; tout le vallon compris entre eux et nous était dans l’ombre. Un chien blanc posé au soleil, oreilles droites. — Celui que Maxime a blessé à l’épaule s’est tourné en demi-lune, a roulé avec des convulsions par terre, puis s’en est allé… mourir dans son trou sans doute. À la place où il avait été atteint, nous avons vu une flaque de sang et une traînée de gouttelettes s’en allait dans la direction de l’abattoir. C’est un enclos de médiocre grandeur, à 300 pas de là ; mais il y a cent fois plus de charognes en dehors qu’en dedans, où il n’y a guère que des tripailles et un lac d’immondices. C’est au delà, entre le mur et la colline qui est derrière, que se voient d’ordinaire le plus de cercles tournoyants d’oiseaux. Tout le terrain de ce quartier n’est que monticules de cendre et